La Lettre de l’ASES

Association des Sociologues Enseignants du Supérieur

27

septembre

1999

 

L'ASES - Poursuivre la dynamique engagée !

par Daniel Filâtre 3

Innovations pédagogiques : compte-rendu de la rencontre de l'ASES du 20 mars 1999

Innover en tutorat par Jean-Louis Le Goff 6

Enseigner la méthodologie universitaire par Erika Flahaut 21

Une vidéo sur Becker et Friedson à Metz par B.Etienne et V.Meyer 24

Stage et formation à l'analyse sociologique par Michel Villette 31

Faut-il "s'adapter" au nouveau public par S.Garcia et A.Pélage 39

Informations sur le CNU

Bilan des qualifications aux fonctions de maîtres de conférences et de professeur par Alain Chenu 47

Tribune libre :

Lettre ouverte au président du CNU
par Lucie Tanguy et Pierre Tripier 52

Chronique Internet 54

Vie de l'ASES

Compte-rendu de l'Assemblée Générale du 20 mars 1999 60

Compte-rendu du CA du 5 juin 1999 63

Informations 64

Rappel : Samedi 2 octobre
Sorbonne Amphi Durkheim

Journée Europe :cursus et professionnalisation en Allemagne, Espagne, Pologne, Royaume-Uni

La lettre de l’ASES est le bulletin de liaison de l’ASES

Association des Sociologues Enseignants du Supérieur

Cette association Loi 1901 a été fondée en 1989 pour "défendre, améliorer et promouvoir l’enseignement de la sociologie. Elle vise à rassembler, à des fins d’information, de réflexion, de concertation et de proposition, les enseignants-chercheurs et les enseignants de sociologie en poste dans les universités et les établissements d’enseignement supérieur assimilés"

Le Conseil d’administration en est actuellement le suivant :

Régine Bercot

Yeza Boulhabel-Villac

François Cardi

Frédéric Charles

Philippe Cibois (secrétaire général,
chargé du bulletin)

Laurence Costes

Claudine Dardy

Sylvette Denèfle

Michèle Dion (trésorière)

Francis Farrugia

Daniel Filâtre (président)

Suzie Guth

Monique Hirschhorn

Stéphane Jonas

Yvon Lamy

Monique Legrand

Jean-Luc Primon

François de Singly

Jean-Yves Trépos

Maryse Tripier

Marie-Caroline Vanbremeersch

Rédaction de la Lettre de l’ASES : c/o Philippe Cibois

22 bis rue des Essertes, 94140 ALFORTVILLE

tel/fax 01 43 75 26 63 ; cibois@francenet.fr

L’ASES - Poursuivre
la dynamique engagée !

Daniel Filâtre
Président de l’ASES
Université de Toulouse 2

Elu président lors du dernier Conseil d’administration du 5 juin dernier, il me revient l’honneur d’introduire ce numéro 27 de la Lettre de l’ASES. Avant toute chose, je voudrais rendre hommage à Philippe Cibois pour le remarquable travail qu’il a entrepris à la présidence de l’ASES depuis les trois dernières années.

Lors de sa création il y a dix ans, notre association avait un objectif principal, la socialisation du milieu des sociologues enseignants dans les universités françaises et les établissements assimilés. Pour les co-fondateurs de l’ASES, Catherine Paradeise et Pierre tripier, et pour l’équipe qui les entourait, ce milieu apparaissait fortement hétérogène et extrêmement dispersé. Cette dispersion semblait préjudiciable sur divers registres : au niveau des représentations cognitives et institutionnelles, au niveau des connaissances de l’exercice réel de notre métier, au niveau de la revendication également par une confusion entre objectifs professionnels et objectifs syndicaux. L’ASES devait donc permettre et favoriser la création d’une véritable communauté professionnelle.

Aujourd’hui avec 213 adhérents (chiffre en nette augmentation), notre association me semble pour une grand part répondre à ses objectifs initiaux, en assurant les moyens de la rencontre, de l’échange et du débat, en proposant des règles communes de fonctionnement au sein de nos diverses instances, en réfléchissant aux évolutions et aux réformes, en revendiquant la prise en compte de nos intérêts et de nos positions auprès du Ministère. Ici, le rôle de la Lettre est primordial et je pense pouvoir remercier ici au nom de tous, Philippe Cibois pour la qualité qu’il a su donner au bulletin. Ses rubriques témoignent de la vie de l’association mais aussi des débats au sein de notre communauté professionnelle : compte-rendu des rencontres régulières sur des thèmes d’actualité ou des sujets de fonds, dossiers sur les formations ou sur les pratiques pédagogiques, informations sur le CNU avec les comptes-rendus clairs et précis d'Alain Chenu, tribune libre, vie de l’association...

L’action à mener pour l’ASES se situe dans cette continuité, quel que soit le président, parce que c’est d’abord un travail d’équipe au sein du conseil d’administration et avec tous les membres actifs. Lors de notre réunion de juin dernier, nous avons confirmé le rôle des rencontres de l’ASES : elles doivent permettre l’échange et le débat qui se prolongent dans la Lettre ; elles participent ainsi à la construction progressive des références et des identités indispensables à un milieu scientifique professionnel. Ces rencontres ne sauraient être préparées par les seuls membres du conseil d’administration. Au contraire, notre rôle est d’impulser et d’ouvrir à d’autres collaborations pour préparer et construire les prochaines réunions. Pour les mois qui viennent, deux rencontres sont programmées, la première sur la comparaison européenne, la seconde sur les écoles doctorales. D’autres sont mises en chantiers : je vous renvoie à la rubrique vie de l’ASES du présent bulletin. Enfin, selon l’actualité, nous pouvons être amenés à organiser une rencontre-débat sur tel ou tel thème comme par exemple la remise prochaine du rapport parlementaire sur la recherche à l’université. C’est aussi une des missions de l’ASES que de faire savoir notre position face à notre ministère de tutelle et aux institutions publiques concernées, mais sans doute également en direction de la société civile.

L’avenir nous conduira certainement à poursuivre nos réflexions, à débattre de nos modes de fonctionnement, à prendre si nécessaire des positions claires sur l’intérêt de notre discipline et de son enseignement. Il nous revient également à nous faire connaître davantage au sein de notre communauté. Dans ce sens, la parution prochaine de la seconde édition de l’annuaire favorisera une meilleur connaissance entre nous tous et permettra aussi une meilleure diffusion de l’information. Autant de chantiers déjà engagés ou à venir qui démontrent la vitalité de notre association.

Quelques mots sur le sommaire de ce numéro 27. Tout d’abord, un dossier important sur les innovations pédagogiques fait suite à la rencontre qui s’est déroulée à Paris, en mars dernier et qui a connu un vif succès. Plusieurs de nos jeunes collègues nous font part de leurs expériences pédagogiques surtout en DEUG : pratique du tutorat, enseignement de la méthodologie, utilisation du film pour restituer un débat d’une grande richesse, analyse des situations de travail, adaptation aux nouveaux publics. Ces témoignages et analyses illustrent la richesse et la diversité de notre réalité professionnelle ; ils suscitent également commentaires et interrogations dans le prolongement de nos précédents débats sur l’enseignement en DEUG.

D’autre part, Alain Chenu nous rend compte de la dernière campagne de qualification aux fonctions de maître de conférences et de professeurs de la 19e section. Ce bilan nous éclaire pour partie sur le fonctionnement du CNU et constitue ainsi une référence pour tous les futurs candidats. La tribune libre permet de mettre en débat ce fonctionnement.

Dans un tout autre ordre d’idées, Philippe Cibois nous propose une chronique internet pour les passionnés du net ou les récalcitrants contraints.

Enfin, dernière rubrique, la vie de l’ASES résume notre dernière assemblée générale et la dernière réunion du conseil d’administration.

N’oubliez pas que la revue vous est ouverte, tout comme les rencontres régulières à Paris ou en Province lorsque les réseaux fonctionnent. C’est la condition de notre dynamisme.

Daniel Filâtre

 

 

 

 

Elections CNU
Date limite d'envoi du
vote par correspondance

Election des membres du Conseil National des Universités

Le vote a lieu par correspondance. Le matériel de vote est mis à la disposition des électeurs à partir du 6 septembre. Le vote devra parvenir par voie postale au Ministère de l'Education nationale le

7 octobre 1999
au plus tard

 

 

 

 

INNOVATIONS PÉDAGOGIQUES

Compte-rendu de la rencontre ASES du 20 mars 1999

***

Innover en tutorat : vers une rénovation pédagogique plus large ?

Jean-Louis Le Goff
Université de Rouen
legoff@epeire.univ-rouen.fr

La formule du tutorat, en vigueur en première année du Deug, est prévue pour pallier les inégalités entre étudiants. Ce dispositif doit normalement permettre, par le moyen d’un accompagnement pédagogique, d’aider les " primo-arrivants " dans leur intégration à la vie universitaire. D’autres étudiants de niveaux de formation supérieurs forment le groupe des tuteurs qui sont chargés de les accompagner. Cet outil qui représente une chance n’est cependant que peu utilisé par les étudiants concernés. Peur d’être stigmatisés comme des étudiants à problèmes, sentiment d’être à la hauteur des exigences demandées, non prise de conscience des véritables risques d’échec sans une aide pédagogique adaptée ? Nous disposons de très peu d’informations sur ce manque de motivation des étudiants, mais l’on remarque, toutefois, que ce sont ceux qui en ont le moins besoin qui, de fait, fréquentent le tutorat pour améliorer leurs performances scolaires.

Devant ce paradoxe, on peut adopter deux attitudes différentes : soit attendre le " client " avec un degré d’efficacité faible au niveau de l’emploi des tuteurs - ce qui pose des problèmes de motivation et de satisfaction : frustration des tuteurs de ne servir à rien - ; soit on transforme la forme et le contenu du tutorat avec le risque de ne pas remplir les conditions de départ imposées par l’administration. Dans ce dernier cas, l’on devient déviant mais indéniablement efficace dans l’utilisation du tutorat. Ce document a pour finalité de présenter l’expérience de tutorat dans le département de sociologie de l’Université de Rouen. Dans ce département, on a choisi le parti d’optimiser le tutorat en respectant dans la mesure du possible les textes ministériels sachant que parfois les limites sont vite atteintes.

Quelques détails sur l’évolution du tutorat semblent nécessaires pour comprendre sa forme nouvelle et comment il s’inscrit aujourd’hui dans la formation de sociologie à Rouen. Je pense que l’expérience décrite ci-dessous montre que le tutorat peut être un élément de dynamisation d’une pédagogie de proximité visant l’autonomisation des étudiants par une transmission de connaissances et d’expériences en cascade tout au long du cursus et à chaque changement de cycle : des enseignants (avec une étape intermédiaire : des titulaires aux chargés de cours) vers les étudiants (tour à tour expérimentés et novices).

Ce dispositif complexe, supposant une socialisation du travail de recherche à chaque niveau (Deug, 2ème cycle, 3ème cycle), est difficile à mettre en place et relativement fragile dans sa pérennité et son efficacité à court et moyen termes. On peut penser évidemment le tutorat indépendamment d’un tel système pédagogique, mais ce serait le considérer alors comme un pis-aller et non comme une possibilité de réfléchir et de transformer nos pratiques pédagogiques.

On abordera successivement, de façon schématique, les points suivants : rappel des contraintes administratives pour la mise en place du tutorat ; historique des difficultés rencontrées ; organisation du nouveau tutorat ; modalités de mise en place du tutorat dans sa forme actuelle (couplage tutorat/ initiation aux méthodes de recherche) ; atouts et limites du dispositif ; conseils divers ; perspectives offertes par le tutorat : bouche-trou ou rénovation pédagogique ?

 

Rappel des contraintes administratives
pour la mise en place du tutorat

Pour ne pas alourdir inutilement la présentation nous ne retiendrons que les points principaux de ces contraintes. Précisons toutefois que le tutorat se sépare en deux catégories : un tutorat dit d’accueil qui consiste à accueillir les étudiants au moment de leur inscription et durant une période assez courte (un à deux mois) en les orientant au sein de l’université ; les tuteurs sont des étudiants de niveau Deug 2 et licence (en cours ou non complète), ils ont une trentaine d’heures à réaliser sur l’année (soit une indemnité d’environ 1200F au total). Un tutorat dit d’accompagnement, dont il s’agit plus particulièrement dans ce texte, consiste en un appui pédagogique sur une période d’environ six mois à raison de dix heures par mois (soit 6000F au total) ; les tuteurs sont des étudiants de maîtrise, DEA, DESS.

a) le recrutement des tuteurs

Tous les tuteurs, âgés de 20 à 28 ans, doivent être inscrits pour la préparation d’un diplôme. Pour le tutorat d’accompagnement, la formation doit pouvoir intégrer un contrat de stage non cumulable avec une autre activité rémunérée à l’université.

Le recrutement se fait par voie d’affichage, la sélection des candidats est réalisée au sein d’une commission ad hoc (directeur de département, deux enseignants, deux étudiants élus du conseil de département). Les critères de sélection sont les suivants : le mérite universitaire, c’est-à-dire le fait pour un étudiant d’avoir réussi ses études malgré les difficultés rencontrées dans son cursus ; la motivation personnelle de l’étudiant détaillée à travers une lettre de candidature ; la situation sociale de l’étudiant au regard de critères socio-économiques (niveau de revenu des parents, etc.).

b) la définition des tâches des tuteurs (d’accompagnement)

Des restrictions définissent le tutorat d’accompagnement ; celles-ci, bien que nécessaires, signalent également une certaine ambivalence de son statut et de son rôle au regard de l’enseignement, qui se retrouve dans le problème de fréquentation du tutorat par les étudiants. Le tutorat n’a pas pour mission de suppléer à l’enseignement (les tuteurs ne sont pas des enseignants), ni de constituer une préparation directe aux contrôles des connaissances (un entraînement aux examens).

Le tutorat a par contre pour finalité de mettre en relation les étudiants " primo-arrivants " et les enseignants (les tuteurs sont des relais) ; de recenser les lacunes et les incompétences détectées auprès des étudiants tutorés et de les transmettre aux enseignants ; d’améliorer les techniques de travail des " primo-arrivants " : aide à la prise de note ; apprentissage du travail en bibliothèque et à la recherche d’informations ; aide à la découverte de données sur informatique (les tuteurs seraient les gérants de salles informatiques) ; de soutenir le moral des primo-arrivants en difficulté ; de favoriser leur intégration (rôle de socialisation, convivialité).

Par bien des aspects, on peut envisager le tutorat comme redondant par rapport au MTU (méthode de travail universitaire) tel qu’il est envisagé dans sa forme classique. Ceci peut expliquer le niveau faible des demandes en tutorat.

c) l’encadrement des tuteurs

Plusieurs points importants sont à relever : le ou les enseignants chargés d’encadrer les tuteurs sont désignés par l’UFR ou par les départements ; un enseignant doit encadrer 10 à 15 tuteurs ; les tuteurs doivent avoir des représentants au conseil pédagogique du département ; pour les enseignants, l’encadrement des tuteurs est valorisé ou indemnisé comme un encadrement de stage (décharge éventuelle…)

d) étudiants tutorés

Plusieurs principes sont à respectés : le tutorat doit être accessible à tous les " primo-arrivants " qui ne peuvent être que volontaires ; un tuteur n’est pas chargé d’un groupe d’étudiants particulier ; le tutorat ne doit pas être organisé par groupe d’étudiants ; les tuteurs doivent répondre aux besoins des tutorés.

e) validation / évaluation

Le tutorat est à considérer comme un stage à part entière dont le responsable est l’enseignant assurant l’encadrement. Il est apprécié : par un bilan dressé par les tuteurs et les enseignants assurant l’encadrement (nombre de tutorés, questions posées, problèmes résolus…) ; par un " indice de satisfaction " des tutorés (questionnaire).

Ces contraintes administratives et/ou organisationnelles méritent quelques commentaires. Si elles représentent des gardes fous indéniables dans un environnement où les dérives sont très fréquentes, il n’en reste pas moins qu’elles forment également un ensemble de mesures qui empêche d’envisager le tutorat comme un outil au service d’une politique pédagogique qui se voudrait plus ambitieuse. Dans la conception actuelle du tutorat, on attend que les étudiants (notamment en difficultés) se manifestent d’eux-mêmes comme s’ils avaient vraiment une claire conscience de leurs problèmes. En fait, comme on le verra plus loin, cette capacité des étudiants de prendre conscience de leurs difficultés suppose un recul personnel qui est finalement le fait des étudiants dont le capital culturel est largement supérieur à la moyenne ; cela explique en partie que ce sont les meilleurs étudiants qui s’adressent le plus naturellement aux tuteurs.

Historique des difficultés rencontrées

J’ai pris en charge le tutorat en 1996-97, il existait déjà depuis plusieurs années mais sans responsable attitré (fonction laissée à des ATER). Durant la première année, la mise en place fut assez longue : mon travail a consisté essentiellement à recruter les étudiants tuteurs (tutorat d’accueil et d’accompagnement), à les sélectionner en composant un jury, à organiser des réunions pédagogiques tard dans l’année (mois de janvier) - le tutorat fonctionnant avec des fonds qui sont débloqués chaque année au 1er janvier, et la mise en place demandant un mois. En outre, les critères de sélection ne sont pas explicites et une ambiguïté fait que le tutorat est souvent considéré comme une allocation pour des étudiants (aide déguisée). Au cours de l’année, on a dû constaté avec les tuteurs que la demande était très peu importante ; en fait la demande venait essentiellement des Deug2 pour réaliser des dossiers et aborder des questions statistiques. L’impression générale qui se dégageait de cette expérience était teintée d’amertume (beaucoup de temps perdu pour un résultat médiocre).

Attentes et besoins des étudiants (enquête par questionnaires réalisée par les tuteurs en 1997-98)

Thèmes

Deug1

Nombre de réponses

 

Deug2

Nombre de réponses

 

Total

des réponses

%

Fonctionnement de la bibliothèque

51

24,10%

19

9,00%

70

33,00%

l'utilisation de programme de recherche documentaire (logiciel PASCAL...)

130

59,40%

58

26,50%

188

85,80%

méthodes de prise de notes

18

8,50%

11

5,20%

29

13,70%

rédaction de fiche de synthèse

94

44,30%

35

16,50%

129

60,80%

Réalisation d'un résumé d'ouvrages ou d'articles

78

36,60%

39

18,30%

117

54,90%

orientation dans les filières en sociologie

122

55,50%

65

29,50%

187

85,00%

validation des modules

102

47,90%

23

10,80%

125

58,70%

éclaircissement de certaines notions

97

46,90%

52

25,10%

149

72,00%

Remarque : les chiffres donnés ci-dessus représentent les réponses positives aux questions correspondant aux thèmes signalés, ils ne correspondent pas au nombre d’étudiants qui ont répondu au questionnaire.

 

Le thème le plus important pour les étudiants :

Thèmes

Deug1

 

Deug2

 

Total

%

Fonctionnement de la bibliothèque

5

2,60%

0

0,00%

5

2,60%

l'utilisation de programme de recherche documentaire (logiciel PASCAL...)

15

7,90%

2

1,10%

17

9,00%

méthodes de prise de notes

4

2,10%

2

1,10%

6

3,20%

rédaction de fiche de synthèse

9

4,80%

7

3,70%

16

8,50%

réalisation d'un résumé d'ouvrages ou d'articles

12

6,30%

6

3,20%

18

9,50%

orientation dans les filières en sociologie

49

25,90%

21

11,10%

70

37,00%

validation des modules

22

11,60%

2

1,10%

24

12,70%

éclaircissement de certaines notions

22

11,60%

11

5,80%

33

17,50%

Total

138

138

51

51

189

100,00%

%

73,00%

73,00%

27,00%

27,00%

100,00%

 

Remarque : les réponses données ci-dessus signalent le thème le plus important pour chaque étudiant, sachant qu’il y a eu des non-réponses et des réponses incomplètes (au total, 234 étudiants ont répondu au questionnaire).

 

Problème d’apprentissage dans certains cours (Deug1 et Deug2)

Oui

148

63,20%

Non

86

36,80%

Total des réponses

234

100,00%

 

les tuteurs comme relais entre les difficultés d’apprentissage rencontrées et les enseignants (Deug1 et Deug2)

Oui

138

78,90%

Non

37

21,10%

Total des réponses

175

100,00%

 

La deuxième année, plus au courant des contraintes administratives, connaissant les démarches à suivre et la plupart des tuteurs (renouvellement de 30 % seulement), on a essayé de mettre en place une enquête sur les motivations ou le manque de motivation pour venir au tutorat (cf. résultats d’enquête ci-dessus à titre indicatif) afin d’attirer davantage l’attention des étudiants. A la suite de l’enquête, qui montre quelques tendances significatives, on a fait une campagne d’information (affichage avec des rappels réguliers en amphi) sur les objectifs du tutorat. En outre, pour rendre visible à tous le tutorat, les tuteurs (en binôme : un tuteur accueil et un tuteur d’accompagnement) se sont installés dans des espaces de convivialité (tables disponibles aux différents étages du bâtiment de l’UFR). Les résultats sont restés médiocres. Les tuteurs, qui ont parfois plusieurs années d’expérience du tutorat, ont manifesté une fois de plus, en fin d’année, leur " exaspération " et le souci de faire du tutorat une aide positive pour les étudiants et qui soit motivante pour eux-mêmes (sentiment net d’inutilité et d’être payé à ne rien faire). Par ailleurs, on a constaté que les étudiants qui viennent au tutorat, n’en ont pas vraiment besoin.

La conclusion qui s’impose en fait, au regard de cette expérience, est la suivante : pour utiliser le tutorat à bon escient il faut l’imposer aux étudiants comme un outil et une étape pédagogiques nécessaires à l’obtention de leur année ; cependant cela doit rester attrayant pour les étudiants – le tutorat n’étant pas obligatoire. Aussi, constatant par ailleurs depuis plusieurs années une lacune importante dans le cursus, c’est à dire l’absence d’une formation précoce à la recherche et au travail d’observation sur le terrain au niveau du premier cycle, il était possible et tentant d’essayer un regroupement entre le tutorat et une UV de méthodologie.

L’idée de coupler le tutorat avec l’UV " Méthode de travail universitaire " (MTU) a paru aux tuteurs d’emblée une proposition intéressante. Cependant, il fallait revoir le statut de la MTU qui changeait de nature en transférant les contenus de l’enseignement MTU au tutorat (la charge de travail pouvant s’accroître considérablement pour les tuteurs). En outre, la proposition faite aux chargés de cours du MTU, d’effectuer un changement radical (et officiel) du contenu des cours de MTU qui servait déjà à sensibiliser les étudiants à l’enquête de terrain, parut très positive et valorisante pour eux ; il ne restait plus qu’à systématiser l’ensemble du dispositif. L’engouement général pour le projet et l’accord des collègues pouvait laisser penser, au mois de juin 1998, qu’une solution était possible pour le tutorat et qu’en plus elle permettait de donner un nouvel élan à des pratiques pédagogiques existantes mais non reconnues (voire blâmées).

La troisième année, le tutorat est ainsi devenu un accompagnement pédagogique de la MTU nouvelle version. En fait les tuteurs encadrent les étudiants sur la base des thèmes enseignés au sein de MTU en les aidant à la prise de note, à la rédaction de leur projet, en discutant des problématiques, des difficultés de la recherche bibliographique… Le tutorat est devenu le pivot d’un travail d’équipe (15 personnes).

Il faut noter que cette année on a mis en place le tutorat d’accueil et d’accompagnement dès le mois d’octobre. Un reliquat permettait de payer aussitôt le tutorat d’accueil tandis que les tuteurs d’accompagnement ont dû attendre d’être payés (rétroactivement) dès le mois de janvier sur la base des heures déclarées.

Organisation du couplage MTU/tutorat

- 400 étudiants inscrits en Deug1

- 10 tuteurs d’accompagnement (6 mois) ; formation : niveau maîtrise, DEA ou thèse

- 6 tuteurs d’accueil (3 mois) ; formation : niveau Deug2, licence

- 5 enseignants (dont un titulaire)

- Tutorat d’accompagnement sur la base de thèmes annoncés en relation avec l’enseignement de MTU.

-Tutorat inscrit dans l’emploi du temps le même jour que le MTU.

- Les tuteurs fonctionnent normalement en binôme (soutien mutuel, travail en équipe, souplesse de fonctionnement)

Remarque : Le tutorat d’accueil permet de connaître les futurs tuteurs d’accompagnement, tandis que le tutorat d’accompagnement permet de former et de repérer les futurs chargés de TD, dans le contexte d’un travail d’équipe.

On a prévu un coordinateur ou une coordinatrice (ATER), enseignant le MTU pour réguler en dehors des réunions (prévues une fois tous les mois) les problèmes au fur et à mesure de leur apparition (par exemple problèmes liés à certains décalages concernant le détail de ce qui est demandé et exigé par les différents enseignants ; décalages qui apparaissent largement amplifiés au niveau du tutorat). Cette coordination doit agir vite avant que les problèmes ne soient incontrôlables du fait du nombre des étudiants (400 étudiants) et de l’effet de rumeur qui en résulte. Si nécessaire, le coordinateur a la possibilité d’organiser des réunions.

Modalités de mise en œuvre

Le couplage tutorat-MTU suppose un travail dans la durée, c’est-à-dire sur l’année pour une bonne assimilation des principes et pour que le couplage soit opérationnel (décalage entre la mise en fonction du tutorat et du MTU pour diverses raisons). Il n’y aura pas de double emploi car les missions sont distinctes tant en nature qu’au niveau du planning.

On prévoit des TD de 20 à 30 personnes à raison d’une fois tous les 15 jours sur toute l’année (soit 25h/an). Cette périodicité permet de dégager du temps et des salles pour le tutorat. Précisons les objectifs du MTU nouvelle mouture :

- Objectif pédagogique : sensibiliser les étudiants aux difficultés théoriques et pratiques d’une enquête sociologique sous ses différentes formes.

- Le thème retenu pour cette année : l’interaction dans les lieux publics étudiée sous ses différentes formes (café, marché, musée, transport, gare, hôpital,etc.). L’avantage de cette formule est l’ouverture des lieux d’observation, de sorte qu’il n’y a pas de problèmes d’accès au terrain ; par ailleurs, le département de sociologie ne risque pas d’engager dans ce contexte sa responsabilité au delà de limites raisonnables.

Pour le premier semestre 

Pour le MTU : initiation aux méthodes de recherche (plan d’enquête, problématique, quelques données sur les techniques d’enquête) ;

Pour le tutorat : apprentissage des prérequis : fiche de lecture, prise de notes, recherche documentaire, etc.

Une évaluation sur le travail de tutorat et du MTU est faite en janvier : un projet de recherche individuel incluant une proposition motivée pour une enquête de terrain (objet, problématique), une fiche de lecture synthétisant quatre articles, une bibliographie de 10 articles ou livres sur le thème choisi, proposition de méthodes (avec présentation possible d’une préenquête). Les différentes propositions de l’étudiant doivent permettre de faire des regroupements d’étudiants (groupe de 2 à 3 personnes) par affinité de thème et d’approche au second semestre.

Pour le second semestre 

Pour le MTU: approfondissement des connaissances sur les méthodes d’enquête : entretiens, questionnaires, observation directe et participante ; expérimentation sur le terrain de ces méthodes. Les chargés d’enseignement doivent répondre principalement aux points de méthode de façon plutôt théorique.

Pour le tutorat (accompagnement) : son rôle sera de suivre, d’accompagner et de soutenir les étudiants dans leur démarche de terrain (maintenir une cohérence de groupe, et des projets).

Une évaluation du travail sera faite en fonction du résultat d’enquête : dossier collectif à 2 ou 3 personnes avec des parties nominatives (méthodes et résultats d’enquête) et communes (réflexion à partir d’une confrontation des avantages et inconvénients des méthodes utilisées vis-à-vis d’un objet d’étude identique) ; un travail individuel sans partenaires n’est pas exclu, mais il suppose un effort plus important de l’étudiant qui choisit cette solution. On peut penser à une restitution des résultats globaux (textes, photos) sous forme de petite exposition.

Atouts et Limites du dispositif

Les retombées positives du dispositif sont nombreuses et importantes :

- le tutorat est devenu un élément indispensable du MTU et de la pédagogie du département de sociologie,

- on observe un réel transfert d’expérience (de savoirs, savoir-faire et savoir être) entre étudiants de deuxième, troisième cycle et premier cycle. " Les étudiants étaient réceptifs au programme décidé au début du tutorat. Surtout en ce qui concerne les interventions " utilisables " pour leur travail de recherche de MTU (fiche de lecture, bibliographie). Une autre partie du tutorat s’articule au thème de recherche choisi par les étudiants. Ce sont les étudiants les plus motivés qui participent à ce travail de discussion " (Céline et Noël, tuteurs). Les étudiants sont peu demandeurs concernant les examens " Les séances de méthode les ont intéressés. Certains étudiants venaient tous les 15 jours. Peu demandeurs sur les examens, même si nous leur avons distribué les polycopiés de session d’examen " (Aude et Nathalie, tutrices). " … Enfin, il s’agit de faire autre chose que de la méthode basique de prise de notes, de fiches de révision et de préparation aux examens. Le tutorat n’est plus un accompagnement méthodologique scolaire, sans grand succès d’ailleurs, il est devenu un accompagnement méthodologique scientifique " (Karine et Rosa, tutrices). Le travail de recherche dès le Deug1 représente ainsi une ouverture sur d’autres pratiques qui incluent celles plus classiques de MTU et de tutorat,

- les tuteurs peuvent faire remonter des informations sur certains dysfonctionnements qui peuvent compléter celles venant des délégués d’année (certains tuteurs sont aussi délégués) dans le cadre notamment du conseil pédagogique mis en place afin de favoriser une politique pédagogique sur le moyen terme.

- il y a construction d’un projet de recherche afin de mieux préparer les étudiants à l’élaboration d’un mémoire ultérieur (ce qui résoudrait le déficit observé en maîtrise) et peut être plus globalement leur procurer les moyens de réaliser des projets personnels et professionnels,

- l’approche de la sociologie est plus concrète en mettant à l’épreuve des faits différentes théories et en les mettant en perspective par un travail de comparaison. " Les étudiants semblent avoir apprécié le tutorat qui était pour eux source de motivation et de réconfort dans leur démarche. Le tutorat leur a permis de se familiariser avec les théories sociologiques et les différents outils d’enquête, avec l’aspect pluridisciplinaire de la sociologie, mais aussi une sociologie plus concrète " (Karine et Rosa, tutrices). Les étudiants notent eux-mêmes ce rapport plus concret à la sociologie : "… j’sais pas si vous êtes au courant du travail que l’on a à faire en MTU, je crois que c’est nouveau en première année et on a un dossier à faire, une recherche, donc c’est vrai que quand tu débarques en première année, c’est pas forcément évident . Moi je trouve ça très bien parce que ça permet de donner un boulot tout au long de l’année qui est intéressant, qui nous met dedans plus que si on allait juste en cours et avoir à les bosser et heu.., à ce niveau le tutorat m’a bien aidé parce que c’est vrai, au début tu ne sais pas comment t’y prendre donc c’était plutôt bien " (étudiant de Deug1 interrogé dans le cadre d’une enquête de licence, atelier sur " le travail étudiant "),

- utilisation précoce des équipements Centre de documentation et de recherche (CDR) de l’UFR et enrichissement du fonds pour répondre aux demandes liées aux recherches des étudiants,

- sentiment d’être utile pour les tuteurs et professionnalisation pour ceux qui se destinent à la recherche et à l’enseignement, dans un contexte chaleureux. " Après trois années de tutorat, c’est la première expérience qui porte ses fruits. Dès le commencement du tutorat, nous avons eu la charge d’un groupe d’une quinzaine d’étudiants. Le couplage avec MTU et surtout la mise en place d’une enquête de terrain ont donné un rôle aux tuteurs " (Rosa et Karine tutrices),

- le tutorat est certainement un moyen efficace, convivial et économique (mais encore insuffisant) de pallier certaines carences pédagogiques dues au système scolaire et universitaire (rupture parfois brutale entre le lycée et la faculté expliquant de nombreux désistements). Des liens socio-affectifs se tissent entre étudiants et tuteurs, ce qui garantit un suivi pédagogique sérieux: " Notre groupe d’étudiants s’est maintenu en nombre (15 étudiants) durant tout le premier semestre et ce malgré les grèves. Certains ne sont venus qu’à une ou deux séances tandis que le gros des troupes n’a manqué que très peu de tutorat. Les plus assidus semblent avoir terminé leur travail avant les autres, ils étaient également les plus motivés " (Karine et Rosa, tutrices). Même ceux ou celles qui ne peuvent pas venir mentionnent l’aspect positif du tutorat : " j’y vais pas [au tutorat]. Je ne peux pas y aller car les horaires ne correspondent pas mais je trouve que c’est bien. Ceux qui y vont me disent que c’est bien. Surtout qu’en première année on a un dossier à rendre, une étude de terrain et en fait ils nous aident à faire, par exemple, des questionnaires… des trucs comme ça… ouais je trouve que c’est pas mal. " (étudiante Deug1).

Les points noirs sont peu nombreux pour autant que l’on puisse en juger :

- la durée du cours MTU étant très courte (12 heures pour méthodologie et 12 heures pour le terrain sachant qu’une partie est consacrée à la discussion des projets et des réalisations), un report du travail des enseignants peut ainsi s’effectuer sur le tutorat qui n’est pas prévu pour suppléer aux manques d’heures au niveau des vacations,

- les résultats sont déjà intéressants, le niveau des dossiers rendus montre le potentiel élevé des étudiants de Deug1 malgré tout ce que l’on peut en dire parfois. Ces résultats sont indéniablement liés au travail effectué par le tutorat. On peut regretter toutefois, malgré le fait que ce dispositif touche une grande quantité d’étudiants (environ 300 sur les 400 inscrits du fait des abandons), que l’on ne puisse pas encore réduire la marge d’échecs qui reste importante,

- au second semestre on note une baisse de fréquentation notable des cours de MTU et du tutorat. On peut l’expliquer par des abandons importants et fréquents après les résultats du premier semestre et/ou à un repli des étudiants qui ont eu le sentiment d’avoir travaillé de façon importante au premier semestre. Les vacances de Noël sont l’occasion d’un décrochage comme l’indique, lors d’une enquête sur le travail étudiant, cette étudiante en première année, particulièrement studieuse, à propos de son emploi du temps : "le second semestre…j’ai décroché…j’en ai parlé autour de moi et apparemment c’est général " ; et cet autre étudiant "Heu… le tutorat, j’ai été au premier semestre, là je n’y vais plus parce qu’avec les horaires et tout ça… " (étudiant de Deug1),

- le tutorat d’accueil ou d’orientation des étudiants dans l’université reste inemployé par les étudiants alors que les besoins sont réels.

Conseils divers

Quelques conseils sur la méthode sont nécessaires pour la mise en place du tutorat. En plus des conseils prodigués par les textes officiels que nous pouvons commenter, nous en ajouterons quelques autres. Le BEVE recommande, par exemple, d’avoir une salle " tutorat " dans chaque composante. Il faut savoir que cet aspect du tutorat est le plus difficile à satisfaire dans des facultés où l’on observe une pénurie de salles, c’est souvent la croix et la bannière pour en obtenir une. Une solution consiste alors à inscrire secrètement le tutorat dans l’emploi du temps en qualité de TD, ce qui fait " hurler " les collègues lorsqu’ils découvrent éventuellement le subterfuge ! Cette attitude s’explique par le fait que le tutorat est le parent pauvre de la pédagogie de proximité dans les universités et suscite peu d’intérêt, voire un certain mépris, de la part des enseignants. Le BEVE suggère de prévoir des réunions mensuelles (même brèves) entre tuteurs et enseignants ; d’organiser des réunions thématiques sur des sujets en rapport avec les objectifs du tutorat. Ces mesures pédagogiques permettent une cohérence d’ensemble compte tenu des difficultés matérielles (salles dispersées, horaires des permanences éclatés sur la semaine) ; de faire commencer le tutorat d’accompagnement dès la fin du tutorat d’accueil ou au plus tard au 15 novembre.

A ces conseils du BEVE, nous ajoutons les suivants qui nous paraissent tout aussi importants. Il est souhaitable :

- de coupler le tutorat avec au moins un cours fondamental (de méthodologie ou de théorie sociologique) ;

- d'inscrire impérativement le tutorat dans l’emploi du temps des étudiants pour qu’ils identifient le tutorat comme un élément quasi obligatoire de leur formation ;

- de programmer et afficher les thèmes du tutorat pour chaque séance de chaque groupe de tutorat ;

- de mettre en place une coordination entre le tutorat et les enseignements auxquels il est couplé.

- de désigner ou demander à un enseignant titulaire de s’occuper personnellement du tutorat pour donner un poids aux actions menées et mobiliser certaines ressources du département. Cette précaution n’est pas superflue car il peut y avoir un responsable officiel qui délègue à un étudiant (ATER ou non) toute la responsabilité du tutorat.

Perspectives d’avenir

Dans les projets de maquette du département de sociologie à Rouen, on a augmenté le taux horaire du MTU ou initiation à la recherche de 25 h à 50 h pour l’année.

On pense prolonger cette expérience au Deug2 avec un autre dispositif, mais dans la continuité du Deug1 et en relation avec les ateliers de licence. Cependant, si l’on prévoit un tutorat pour le Deug2, celui-ci ne pourra être utilisé que marginalement (sur le compte d’heures du tutorat prévu pour le Deug1).

Un tutorat pour le second cycle ?

Le tutorat, comme formule pédagogique venant en aide aux étudiants par une forme de parrainage, devrait pouvoir se généraliser aux maîtrises : les doctorants (certains en ont manifesté déjà le souhait) s’occuperaient, en binôme avec un enseignant, de quelques étudiants de maîtrise (deux ou trois) ; cela peut prendre également la forme d’ateliers (déjà existants dans certains cas) où les doctorants accompagneraient un enseignant pour l’élaboration des problématiques et des problèmes de terrains des étudiants.

A ce niveau, on assisterait ainsi à un double parrainage : entre les doctorants et les étudiants de maîtrise - en partenariat avec un enseignant - ; entre les doctorants et les enseignants, dans la conduite d’un travail de recherche pouvant être l’occasion d’un apprentissage positif et valorisant. Ce type d’échange existe dans le cadre de journée doctorants ; mais ce qui est proposé ici consisterait à former les doctorants pédagogiquement au suivi de mémoires, sachant que l’apprentissage de la recherche par le travail de thèse est d’un autre ordre. Il reste cependant à dégager les fonds nécessaires pour financer ce type d’opération.

Un projet de parrainage entre doctorants est en cours pour faciliter l’intégration des doctorants de première et de seconde année dans le laboratoire du département.

Le tutorat : bouche trou ou pis aller ?

Le tutorat comme élément moteur d’une transformation des pratiques pédagogiques suppose de revoir en profondeur le système actuel, très rigide et hiérarchique. Quelles que soient les bonnes volontés individuelles, elles ne suffisent pas à pallier les nombreuses carences dues souvent au manque de moyens (argent et temps). L’université a des savoir-faire pédagogiques et scientifiques qu’elle doit transformer en les articulant davantage, non pas par des artifices formels (réformes souvent non financées adéquatement) mais par un meilleur partage des expériences à tous niveaux. Cette attitude suppose une volonté pédagogique et politique qui ne me semble pas en vigueur. Pour pratiquer la méthodologie à tous les niveaux, je constate qu’elle est un enjeu institutionnel qui bloque le système universitaire parce qu’elle est pensée, consciemment ou inconsciemment, souvent comme une source de pouvoir. Aussi, se distribue-t-elle soit mal (maladresses pédagogiques dues à des hésitations ou/et à un certain dogmatisme méthodologique), soit à petite dose (empirisme excessif) sans tenir compte des attentes des étudiants qui ont parfois des idées intéressantes, innovantes que l’on a vite fait de dénaturer. Le tutorat comme instance intermédiaire entre le corps professoral et les étudiants pourrait permettre un meilleur transfert de compétences et un meilleur dialogue (réduction de certaines incohérences pédagogiques) et un renouvellement des questions relatives à la pédagogie de la recherche, atout essentiel de l’Université.

Jean-Louis Le Goff

 

 

 

 

***

 

 

 

Enseigner différemment la méthodologie des pratiques universitaires

Erika Flahault
Université de Marne-la-Vallée
erika.flahault@excite.fr

A la rentrée 1998, s’est ouvert à l’université de Marne-la-Vallée un enseignement de Méthodologie des pratiques universitaires qui s’adresse aux étudiants de première année du Deug sciences humaines et sociales (SHS), année commune aux Deugs de sociologie et d’histoire. Ces étudiants, issus de filières et de baccalauréats divers, constituent un public hétérogène très demandeur de ce type d’accompagnement. Dans une certaine mesure, ce soutien relève des attributions du tutorat, mais pour une part seulement, et l’expérience montre que ce dernier, basé sur le volontariat, n’attire généralement pas les étudiants qui en auraient le plus besoin.

Ce nouvel enseignement est, lui, obligatoire et se déroule sur le premier semestre, à raison d’un TD de deux heures par semaine pour des groupes de 25 à 30 étudiants.

Nous l’avons élaboré et dispensé au sein d’une équipe de quatre enseignants, deux sociologues et deux historiens, Prag et Ater. Par souci de le rendre plus concret pour les étudiants, nous avons régulièrement relié nos enseignements à des thèmes abordés par les cours d’histoire et de sociologie (cette année sur la famille). Toutefois, certains exercices s’en démarquaient totalement pour marquer son caractère général.

Les TD de méthodologie reposent sur une double démarche. D’une part une aide relativement classique aux pratiques universitaires reposant sur les apprentissages élémentaires :

- Usage des bibliothèques et organisation d’une bibliographie. Au cours de séances sur les lieux, nous avons présenté la bibliothèque et son mode de fonctionnement aux étudiants et leur avons proposé des exercices pratiques, à réaliser en petits groupes. Présentations d’ouvrages, élaboration de programmes de lecture et de bibliographies classées, sur des thèmes choisis en fonction du fond disponible. Cette première approche a permis aux étudiants de faire connaissance avec les lieux et avec leurs camarades et de se familiariser avec les normes de la bibliographie. Elle a aussi été l’occasion pour les enseignants d’insister, dès le premier cours sur l’importance de la lecture à l’université.

- Réalisation et utilisation des fiches de lecture et fiches thématiques. Nous avons travaillé en commun sur l’élaboration de telles fiches (extraire les idées essentielles et les organiser, présentation, visualisation des idées, abréviations) et sur leur utilisation ultérieure (révisions, résumé d’un texte, préparation d’un exposé)

- Prise de notes et utilisation. Quelques conseils relatifs à la prise de notes ont été suivis par des exercices pratiques : reprise des notes de cours, prise de notes sur un texte lu à haute voix, prise de notes sur un chapitre d’ouvrage en temps limité, travail de résumé du chapitre à partir des notes et correction des exercices.

- Prise de parole en public. Le but de ces séances était de travailler sur la forme de l’exposé oral afin de familiariser les étudiants avec un exercice qui leur est demandé tout au long de leur cursus et de les aider à évacuer les angoisses qui y sont associées. Chaque étudiant a présenté un bref exposé sur un sujet libre et a été évalué par ses camarades à partir d’une grille élaborée en commun. Les points d’évaluation portaient sur les thèmes suivants : intérêt et traitement du sujet, recherche d’une problématique, structure de l’exposé (plan, articulations, transitions), utilisation des supports, expression, attitude (voix, regard, posture du corps) aptitude à capter l’attention du public et à susciter un débat.

- Travail de dissertation. Nous avons travaillé à partir de textes sociologiques et historiques et à partir de copies anonymes des années précédentes que nous avons décortiqués ensemble pour en retrouver le plan détaillé et la construction (distinguer les idées principales, les arguments et les exemples, retrouver les transitions et les articulations). Enfin, nous avons insisté sur la construction du plan et de l’introduction à partir d’exercices et d’exemples.

Dans le même temps, nous avons souhaité mettre en pratique les suggestions pédagogiques présentées par Alain Coulon à la suite de ses recherches sur le métier d’étudiant (PUF, 1997)

Nous avons donc demandé à nos étudiants de tenir un journal de bord pendant les cinq premières semaines de leur vie à l’université. Il s’agissait d’un exercice obligatoire mais ne donnant pas lieu à une validation. Il était en revanche rendu annoté à chaque étudiant, avec des remarques personnelles, des réponses à des questions simples, des suggestions, des réflexions sur les propos lus et une appréciation d’ensemble. Nous avons également évoqué en TD, au moment de la restitution, les principaux problèmes soulevés par ces journaux et les différentes réponses apportées par les étudiants eux-mêmes ou par nos remarques.

La consigne était d’écrire tous les jours, au moins quelques lignes, sur leur vie d’étudiant : raconter leur expérience d’entrée à l’université, observer ce qui se passe autour d’eux, tant au sein de l’université qu’en dehors de ses murs, décrire leurs relations avec les autres étudiants, les enseignants, les personnels administratifs, expliquer ce que leur statut d’étudiant a pu modifier dans leur mode de vie, leurs rapports avec leur famille, leurs amis, détailler les problèmes qu’ils rencontrent et éventuellement les réponses qu’ils y apportent, exposer leurs inquiétudes, leurs sentiments, leurs réflexions sur ce nouveau milieu, ce qui les surprend ou les déconcerte dans son mode de fonctionnement.

En faisant tenir ce journal quotidien à nos étudiants, nous poursuivions plusieurs objectifs. D’une part, construire l’habitude d’écrire chez des étudiants qui ont parfois un rapport difficile à l’écrit, mais aussi leur faire prendre conscience qu’ils ne sont pas étudiants seulement lorsqu’ils sont en cours ou à l’université, les faire réfléchir sur leur nouvelle situation et sur leur affiliation progressive à ce statut. L’entrée à l’université est un passage que tous les étudiants ne franchissent pas de la même façon ni dans les mêmes délais. Ils doivent s’adapter aux codes et exigences de l’enseignement supérieur et se sentent souvent très isolés pendant les premiers temps de ce processus d’adaptation. Tout d’abord, les journaux font apparaître leur surprise et leur incapacité provisoire à organiser leur travail devant ce qu’ils appellent le "vide" de leur emploi du temps, leur incompréhension et leur inquiétude relatives à l’organisation des partiels, leur isolement et leur nostalgie de la vie lycéenne ou encore leur inaptitude à pallier les manques et la surpopulation de la bibliothèque universitaire. Puis, progressivement, des liens se nouent, des solutions individuelles ou collectives s’ébauchent à ce qu’ils ne considèrent plus réellement comme des problèmes. Ils observent des changements d’attitude dans leur entourage et notent leurs propres évolutions.

Le journal et les discussions qu’il suscite permettent aux étudiants de prendre conscience de leur sort commun et de leur intégration progressive au statut d’étudiant. Ils contribuent à l’apprentissage de "mise au travail intellectuel" par lequel doit passer tout étudiant nouvellement inscrit à l’université.

Erika Flahault

" Trois leçons de sociologie "
A propos de la venue de H.S. Becker et E. Freidson à l'Université de Metz

Bruno Etienne et Vincent Meyer
Université de Metz
7 rue Marconi 57070 METZ

La venue, à l’invitation du département de sociologie et de l’ERASE, de Howard S. Becker et Eliot Freidson à Metz durant une semaine a incontestablement constitué un événement pour l’université. De jeunes chercheurs ont ainsi eu l’occasion de présenter leurs travaux et d’échanger des points de vue avec des sociologues dont la notoriété et le prestige n’ont pourtant jamais nuit à la bienveillance et à la simplicité.

La nécessité de garder une trace qui dépasse le caractère de célébration de l’événement s’est imposée d’emblée, tant il paraissait indispensable de pouvoir faire partager cette expérience aux autres départements de sociologie de l’Université française. Le parti a donc été pris dans un premier temps de filmer l’intégralité des journées de travail qui se sont déroulées en novembre 1997, puis J.Y. Trépos, directeur de l’ERASE et D. Pardonnet, responsable du CAVUM, ont conçu un film qui, en organisant thématiquement une grande partie des propos tenus, apporte une dimension didactique et générale aux commentaires que les sociologues américains avaient livrés en réaction aux exposés des chercheurs de l’ERASE.

Le résultat est un film d’une heure quarante intitulé Trois leçons de sociologie, composé de trois parties distinctes respectivement nommées, Sur le travail de terrain, Du travail de conceptualisation et Professions, expertise, compétences. L’ensemble est complété par un livret d’accompagnement conçu par J.Y. Trépos, qui apporte, pour chacune des séquences du film, des indications bibliographiques et de courts extraits de textes qui éclairent et prolongent les propos de Becker et Freidson.

Clairement destiné à des fins pédagogiques, ce film impose donc une réflexion à la fois sur la nature de son contenu (que montre-t-il qui puisse susciter un intérêt chez ceux qui n’ont pas assisté à l’événement ?) et sur l’exploitation qui pourrait en être faite (que peut-il apporter à un cours que ne fourniraient pas des textes écrits ?)

On propose d’examiner ces deux aspects en rendant compte de deux expériences d’utilisation d’extraits du film, l’une dans un TD d’épistémologie de 1° année de DEUG, l’autre en 2° année, dans le cadre d’un TD de description et analyse des phénomènes sociaux.

1 - Que font-ils ? Que disent-ils ?

En montrant deux grandes figures de la sociologie mondiale, représentants d’une tradition théorique et méthodologique aujourd’hui largement reconnue, on court le risque de provoquer un effet " d’imposition ", la notoriété des protagonistes jouant inévitablement en faveur d’une approche respectueuse, voire admirative de la situation. Cette modalité de la réception qui confère au propos sa dimension événementielle n’est pourtant pas à écarter totalement puisque de toute évidence, la venue en France, et qui plus est, dans une université de province de Becker et Freidson acceptant de se livrer à un exercice de confrontation avec de jeunes chercheurs (mais également des étudiants) revêt un caractère plutôt exceptionnel. Et de fait, il nous a été donné d’observer lors de la présentation du film, que les étudiants déjà familiarisés avec l’interactionisme symbolique, et le plus souvent avec les travaux de Becker (notamment Outsiders, fréquemment évoqué dès la première année), éprouvaient une impression " d’émerveillement " ou de moment privilégié, sentiment plus fortement présent encore chez les enseignants et les chercheurs. Mais ce qui est le plus frappant chez la plupart des étudiants, c’est la fraîcheur du regard qui, débarrassé de toutes les connotations culturelles, écoutent deux vieillards sympathiques énoncer sous la forme d’anecdotes aisément compréhensibles que l’observation sociologique peut s’exercer avec une sorte d’innocence qui est tout sauf naïve, que les concepts des sciences sociales sont des généralisations empiriques plutôt que des théories définitives, mais qu’il vaut mieux séparer les questions que de généraliser abusivement, ou encore que s’interroger sur le " comment " des choses est souvent plus heuristique que d’essayer d’en déterminer le " pourquoi ".

Pourtant, au première abord, voici un film qui ne montre que des gens qui parlent, ce qui pourrait être perçu comme le degré zéro de l’écriture cinématographique. De ce point de vue, on peut penser que le support audiovisuel n’ajoute rien au fait de fournir un contenu informatif que l’écrit ou la parole de l’enseignant auraient pu livrer. Mais il est clair que Becker et Freidson ont une capacité à dire des choses très fines, voire complexes, avec un langage ordinaire accessible à tous, y compris aux sociologues débutants, et même s’ils ne saisissent pas toutes les implications de ce qui est dit. C’est sans doute ce qui permet d’envisager différents niveaux de lecture de ce film. Il peut être en premier lieu " illustratif " de l’approche interactionniste symbolique, l’image de ses représentants en chair en os n’étant alors qu’une sorte de " supplément d’âme " à un savoir déjà là (je vois et j’entends des auteurs que j’ai maintes fois lus). Mais il peut également être regardé comme un document montrant des savants dans leur activité ordinaire, ce qui ferait, paradoxalement, du spectateur naïf, celui qui, sans le savoir, se placerait le mieux dans l’attitude sociologique adoptée par Becker et Freidson. A cet égard, le film autorise cette lecture préconisée par les sociologues américains et que présente l’une des séquences : " voir sans entendre et écouter sans voir " (le propos est de J. Pennef). Il met en scène l’idée énoncée par Becker, selon laquelle le constat fait par B. Latour que les chercheurs de laboratoire sont des individus portant des blouses blanches et tapant sur des ordinateurs est une importante découverte. Ici, constater que les sociologues sont des gens qui observent le monde pour décrire ce qu’ils y voient est aussi une vraie découverte. Le film permet donc la mise en application immédiate des principes qu’il énonce : quand Becker et Freidson recommande de " donner la primeur à la manière dont les gens se désignent " (titre d’une des séquence de la seconde partie), il induit précisément chez le spectateur cette posture face aux sociologues qui parlent de leur façon d’agir. Autrement dit, le risque existe que le public familiarisé avec la tradition de Chicago écoute " Becker et Freidson " plutôt qu’il n’observe du travail sociologique en train de se faire. Dans cette perspective, le film apparaîtra comme une illustration redondante, dans l’autre il aura le caractère démonstratif de la " leçon de sociologie " qu’il aspire à être. Dans un cas Becker et Freidson seront les sujets du film, dans l’autre ils en seront les objets.

La distinction que l’on propose ici pourra paraître un peu trop subtile. Elle est pourtant ce qui fonde la différence entre un exercice de célébration et un documentaire scientifique. Car si l’on veut bien admettre que Becker et Freidson exerce dans ce film leur " métier de sociologue ", on y verra deux chercheurs élaborant dans l’instant une pensée argumentée qui montre le travail sociologique en train de se faire. Il ne paraît donc pas abusif de considérer ce film comme une sorte de document ethnographique, comme celui qui montrerait un sabotier au travail. Il ne viendrait d’ailleurs à l’idée de personne de penser que le sabotier parlant de son travail ne nous renseigne pas aussi sur le métier de sabotier.

C’est encore cette même distinction qui sera au principe des différentes utilisations pédagogiques envisageables selon les publics visés et dont on donnera un exemple dans ce qui suit.

2 - Qu’en dire ? Qu’en faire ?

Dans l'un des cas, on a utilisé le film dans le cadre d'un TD d'épistémologie destiné à sensibiliser les étudiants de première année aux contraintes liées à la pratique des sciences. On disposait d'un total de 10 heures pour viser deux objectifs : tout d'abord dessiner une sorte de parcours allant d'une épistémologie normative (celle d'une science idéale et exemplaire), à une sociologie des sciences (celle de "la science telle qu'elle se fait"). Ensuite, on souhaitait provoquer une interrogation sur le fait de savoir si les sciences socio-humaines pouvaient répondre aux mêmes exigences épistémologiques que les sciences exactes et naturelles. Les questions de la "rupture épistémologique" selon Bachelard et de la "réfutabilité" poppérienne avaient été traitées comme exemples d'une épistémologie normative. La notion de "paradigme" chez Kuhn a été abordée ensuite comme représentative d'une épistémologie qu'on pourrait qualifier de socio-cognitive. On a travaillé ensuite un texte de J.M. Lévy-Leblond qui s'interroge sur les rapports qu'entretiennent les "sciences dures" et les "sciences molles" sur les plans de l'objet, de la méthode et de la rigueur, texte qui conclut sur le paradoxe apparent d'une insuffisance des sciences exactes et naturelles qualifiées " d'asociales et inhumaines".

L'utilisation du film venait à l'issue de ce parcours pour montrer qu'il existe des formes d'épistémologie différentes de la tradition philosophique européenne, mais qu'il était néanmoins possible d'établir des liens entre les éléments abordés en cours et les propos tenus par Becker et Freidson.

Le choix a été fait de montrer les séquences du film sans commentaires préalables, avec la seule consigne d’essayer de comprendre en quoi ce qui était dit pouvait avoir un rapport avec les questions évoquées en cours. Avec l’extrait intitulé " ne demandez jamais ‘pourquoi’ ", on souhaitait faire apparaître que la question " pourquoi " était du côté de la recherche des causalités alors que le " comment " relevait davantage de la recherche du sens. La séquence " les concepts sont des généralisations ", était destinée à faire réfléchir les étudiants sur la question de la véracité des énoncés scientifiques. L’idée de la généralisation empirique et celle du désappariement des propriétés d’un concept, bien que difficiles à faire passer, ont néanmoins permis de discuter de la pertinence du critère de réfutabilité dans les sciences sociales, et plus généralement de l’habitude culturelle qui conduit à faire une distinction de nature entre le travail de conceptualisation dans les sciences humaines et dans les sciences naturelles. Au total, on ambitionnait de montrer que si l’on acceptait d’observer " la science en action ", la séparation artificielle, mais pourtant bien ancrée, entre épistémologie des sciences de l’homme et épistémologie des sciences qualifiées d’exactes perdait singulièrement de son acuité.

Cependant, si la compréhension de premier niveau ne pose pas de problème (Becker et Freidson s’expriment assez simplement), il faut bien admettre qu’on observe chez les étudiants de première année une difficulté à mettre en relation de continuité ou d’analogie des éléments de connaissance qu’ils possèdent avec ceux qu’ils reçoivent lors de la projection des extraits. Si l’utilisation pédagogique du film dans ce contexte n’exige pas de maîtriser l’arrière plan théorique de la sociologie américaine, il faut donc néanmoins, pour donner une pertinence au propos, produire un travail de reformulation destiné à établir les connexions de savoirs qui ne s’opèrent pas spontanément.

La seconde expérience d’exploitation pédagogique du film s’est déroulée dans un TD de méthodologie pour étudiants de deuxième année de DEUG dont un des objectifs généraux était la préparation de la construction d’une démarche de recherche. Ici, le TD était destiné à préparer un premier contact avec " le terrain " par l’apport préalable de notions théoriques et méthodologiques. Avant la projections d’extraits du film, les étudiants avaient été familiarisés avec certains principes de l’Ecole de Chicago, et notamment les techniques d’observation employées lors d’enquêtes qualitatives (positions, rôles et implication de l’observateur).

Les séquences sont alors utilisées à des fins d’applications directes dans un travail d’enquête. La séquence " voir sans entendre, écouter sans voir " sert à mettre l’accent sur la nécessité de se prémunir contre les observations pré-construites en adoptant une attitude réceptive proche de ce qu’en psychanalyse on appellerait l’attention flottante. L’extrait intitulé " ne demandez jamais pourquoi " est utilisée pour introduire une réflexion sur la préparation de grilles d’entretien et permet de sensibiliser les étudiants aux problèmes de la pertinence du questionnement (en quoi la forme de la question est-elle déterminante quant à la nature de l’information qu’elle permettra de recueillir). Enfin, la séquence " éclectisme dans la recherche, prudence dans la généralisation " est l’occasion de réfléchir d’une part à l’efficacité de l’utilisation d’une diversité de ressources, d’analyses et de perspectives (et notamment de l’intérêt que peuvent avoir des sources généralement considérées comme secondaires ou peu nobles), et incite d’autre part à une certaine humilité dans la portée des conclusions auxquelles peut conduire l’enquête sociologique.

Là encore, on peut faire le constat qu’il n’est pas indispensable de faire une longue présentation de Becker et Freidson dont au moins le nom est déjà connu en deuxième année, et parce qu’en outre, la simplicité du propos rend aisée la compréhension. D’autre part, l’attrait de l’image est important. A cet égard, la brièveté des séquences qui s’apparentent de ce point de vue à des " clips vidéo " facilite l’introduction rapide de la discussion et permet également une rediffusion immédiate propre à renforcer les éléments de réflexion élaborés dans le premier échange. De façon générale, les étudiants semblent tout particulièrement apprécier le récit filmé des observations habituellement déposés dans des ouvrages ou des articles scientifiques.

L’impact réel de ce travail ne pourra donc être évalué qu’après la présentation par les étudiants de leur travail de terrain effectué en fin d’année universitaire.

Dans les deux expériences évoquées ci-dessus, les enseignants ont pu faire le constats de la difficultés à mobiliser la parole des étudiants. Cette faible participation a sans doute des origines multiples (manque d’habitude à l’expression en groupe, hétérogénéité du back-ground théorique des étudiants, importance numérique des groupes de TD) et des explications plus générales (faible propension des étudiants à participer activement, difficulté à mobiliser la pensée relationnelle, manque de " rodage " des séances exécutées ici à titre expérimental). Il semble cependant évident qu’à l’aide d’un important travail d’animation pédagogique, le support filmé permet d’atteindre les objectifs qu’on s’est assignés : mieux qu’une illustration redondante d’un cours ordinaire, il est un matériau brut directement utilisable à l’élaboration d’une réflexion théorique ou à la préparation d’un travail de sociologie de terrain. Il met encore en évidence, s’il en était besoins, la nécessité de préparer, même et surtout avec des étudiants débutants, ses cours avec rigueur…

En guise de conclusion, on peut dire que ces Trois leçons de sociologie remplissent bien des fonctions variées et qu’elles proposent des modalités d’approche multiples. Comme " mémoire " de la visite en Europe de Becker et Freidson, le film aura, au pire, une valeur anecdotique, au mieux, la forme d’une mise en scène d’un événement particulier. Comme document sociologique, on lui accordera des vertus pédagogiques efficaces dès les premières années du cursus de sociologie, mais également une valeur documentaire susceptible d’intéresser également les chercheurs en sociologie.

S’il faut chercher un caractère innovant à l’expérimentation pédagogique présentée ici, ce ne sera certes pas dans l’utilisation du support audiovisuel, trop souvent outil passe-partout des pédagogies à volonté moderniste. Mais c’est plus sûrement dans la possibilité qu’offre le film de faire découvrir à de futurs sociologues la façon dont les représentants illustres d’un courant important de la sociologie moderne produisent un discours sur leur pratiques de chercheurs, montrant ainsi par la même une des dimensions de ce qu’est le travail du chercheur en sciences sociales.

Bruno Etienne et Vincent Meyer
Equipe de Recherche en Anthropologie et
Sociologie de l’Expertise (ERASE)

 

 

 

 

 

 

 

***

 

 

 

 

 

 

Petits boulots étudiants, stages et formation à l’analyse sociologique des situations de travail

Michel Villette
Ecole Nationale Supérieure des
Industries Alimentaires (Massy).

Jusqu’à l’obtention d’une thèse au moins, ne vaut-il pas mieux faire la sociologie d’une profession qu’on connaît bien, plutôt que de faire profession d’être sociologue ?

L’équipier de MacDo, la caissière de Carrefour, le manutentionnaire à Rungis, le peintre en bâtiment au noir, le couturier dans un atelier textile clandestin, le petit trafiquant de drogues et la secrétaire intérimaire chez Manpower ne disposent-ils pas d’avantages compétitifs potentiels par rapport au chercheur académique " titulaire ", puisque la proximité, l’expérience du risque et l’engagement apportent une connaissance directe du monde social tel qu’il est ?

La condition qui est la leur ne leur confére-t-elle pas aussi un avantage compétitif potentiel par rapport aux intellectuels " organiques " : experts, chercheurs sous contrats, consultants, journalistes et autres chargés d’études auxquels il manque la pratique et l’audace pour s’affranchir des convenances et des obligations de réserve ? Comment faire pour que les études de sociologie à l’université soient le cadre le plus favorable possible à la production de nouvelles connaissances sur le monde social et à l’épanouissement de quelques talents originaux ? Comment faire aussi pour que ceux qui abandonneront bientôt leurs études pour des emplois divers et variés ne perdent pas leur temps ?

Je vais tenter d’apporter une contribution sur ces deux points, tout en renvoyant le lecteur au livre L’Art du Stage en Entreprise (La Découverte, 1994) pour plus de détails sur la démarche d’étude directe des situations de travail que je propose.

Enseignant la sociologie en école d’ingénieur après un passage en école de commerce, j’ai constaté que les cursus comportent toujours plusieurs mois de " stage en entreprise " chaque année et que c’est volontiers aux sociologues que l’on s’adresse pour fournir aux étudiants des outils intellectuels d’interprétation de cette expérience.

Dans ces écoles, les périodes de travail " sur le terrain " apportent du crédit à l’enseignement dont ils garantissent l’aspect " pratique " et " utile ". Ils facilitent aussi l’embauche, car dans un curriculum vitae, les temps de stage comptent comme " expérience professionnelle " et offrent une première référence souvent déterminante. Il en est de même pour les travaux réalisés dans le cadre d’une " junior entreprise ". Au contraire, des amis et collègues enseignant la sociologie à l’Université me disent que les étudiants échouent souvent parce qu’ils sont dans l’obligation de gagner leur vie en faisant des " petits boulots ", ce qui les distrait de leurs études.

Je trouve bien curieux qu’une même activité -accomplir un travail de débutant et d’exécution dans une entreprise - apparaissent ici comme un atout et là comme un handicap ! Je trouve curieux aussi que ce qui apparaît comme une excellente occasion d’investigations sociologiques chez les non-sociologues ne soit que rarement et marginalement perçu comme un cadre approprié à des travaux pratiques chez les sociologues qui, pourtant, commencent à connaître la tradition de l’école de Chicago et savent qu’un authentique parcours indigène, pour peu qu’il soit mis en perspective sociologique, reste une des meilleures voies d’accès à la connaissance du monde social.

Les bons esprits sociologiques ne manqueront pas d’interprétations à cet écart de jugement; mais laissons-là, pour nous en tenir à l’aspect pratique des choses. Pourquoi le temps de travail en entreprise parait-il " pédagogique " ici et anti-pédagogique là ? La réponse la plus évidente est que dans les grandes écoles, les stages sont organisés , programmés , institutionnalisés , encadrés ce qui leur donne un sens et une fonction " pédagogique " tandis que dans les cursus universitaires de sociologie, sauf peut-être au moment de la maîtrise, le petit boulot est une activité parasite, sans fonction apparente et donc, sans légitimité.

Mais quelle est la part de la rhétorique et la part de la pratique dans une différence qui n’est peut-être pas aussi fondamentale qu’il y paraît ? Les interventions que j’ai faites dans des écoles d’ingénieurs et de commerce m’ont conduit à penser que le travail intellectuel réalisé par les étudiants et les enseignants autour de l’expérience de stage est souvent réduit à sa plus simple expression. La lecture d’un échantillon de " rapports de stage " permet d’ailleurs de vérifier cette allégation au cas par cas.

Face à cette concurrence moins forte qu’on ne croit, les enseignants universitaires de sociologie gagneraient à faire reconnaître la valeur du travail d’analyse sociologique des petits boulots qu’ils font parfois, et qu’ils pourraient peut être faire plus souvent, plus méthodiquement et avec plus d’emphase, parce que leur compétence disciplinaire les rend, me semble-t-il, particulièrement aptes à réussir dans cette forme de pédagogie.

J’ai écrit ailleurs que, quelle que soit la discipline enseignée, c’est en faisant fond sur les acquis de l’enquête de terrain en sociologie que l’on peut tirer le meilleur parti intellectuel des expériences étudiantes de travail en entreprise : stage, apprentissage ou petit boulot. Ce qui est vrai pour les élèves ingénieurs, médecins, managers ou juristes, pourquoi serait-ce faux précisément pour les seuls étudiants en sociologie ? L’origine sociale, l’absence de sélection scolaire sévère, le manque de maîtrise de l’écriture et du calcul, le manque d’une identité professionnelle reconnue par les entreprises, le manque de familiarité des enseignants avec le monde des entreprises et le manque de moyens sont certes des obstacles, mais sont-ils vraiment rédhibitoires ?

En m’excusant par avance des bévues que je pourrais commettre, n’étant pas familier de l’enseignement dans les premiers et seconds cycles universitaires, je voudrais évoquer très brièvement une voie d’expérimentation pédagogique qui a été parfois explorée à l’Université (), mais qui mériterait aujourd’hui d’être reprise, systématisée et institutionnalisée dans le but de faire reconnaître la sociologie comme une discipline plus pratique et plus en prise avec ces institutions fondamentales que sont l’entreprise et le marché.

L’étude directe des processus en situation de gestion.

Dans L'Art du stage en entreprise, je propose une démarche intellectuelle pour les stages : " l’étude directe des processus en situation de gestion ". Cette méthode de travail s'inspire de la tradition sociologique de l'école de Chicago notamment Everett Hughes, Anselm Strauss, Merville Dalton, de l'enquête ethnographique, en particulier Marcel Mauss et Marcel Maget, et de la recherche " clinique " en gestion. Elle est aussi le fruit de mes propres expériences pour comprendre les situations professionnelles que je vivais, d’abord en tant que doctorant en sociologie, élève de Pierre Bourdieu et de Luc Boltanski, puis en tant que manager.

L'étude directe des processus en situation de gestion est une démarche d'investigation adaptée à l'étude du fonctionnement et des transformations des entreprises, en particulier, les entreprises privées du secteur concurrentiel. Elle ne remplace pas l'histoire, ni l'étude des données statistiques permettant de situer l'entreprise dans son environnement, ni les comparaisons méthodiques entre entreprises, mais constitue une base indispensable, parce qu’elle fournit à l’étudiant l’occasion de produire une connaissance située, en éprouvant par lui-même " ce qui résiste " c’est à dire les réalités techniques, organisationnelles et de marché.

L'objet, c'est l'étude d'un processus répétable (par exemple, le nettoyage quotidien d’une chaîne de production alimentaire, la réduction des consommations de vapeur d’une usine, l’audit des comptes fournisseurs dans un hypermarché, l’organisation d’un séminaire de réflexion stratégique pour cadres dirigeants, la création d’une base de données technico-commerciales, l’animation d’une cellule de reclassement du personnel licencié d’une usine, l’organisation du déménagement d’un siège social, la lutte contre le vol dans un magasin de grande surface, etc.). Quel que soit le phénomène repéré, il s’agit d’en décrire une occurrence avec précision, parce qu'on s'est trouvé bien placé pour le faire. Cette description circonstanciée pourra ensuite être mise en rapport avec une série d'autres descriptions du même phénomène saisi en d'autres lieux et d'autres temps par d'autres personnes, rendant ainsi possible l'échange d'expérience, la comparaison et la remontée en généralité.

La méthode, consiste à suivre le processus étudié en temps réel, du début à la fin, non pas en tant qu'observateur mais en tant que "membre du milieu" à part entière, pris dans la situation et cherchant à avoir prise sur elle. L'apprentissage se fait au cours d'épreuves de réalité qui sont autant de tests sur ce qui est possible et impossible dans la situation. Comme en sciences exactes, l'expérimentation donne lieu à la rédaction - sur le vif - d'un compte rendu d'expérience précis et systématique. Ce compte rendu implique un travail intellectuel accompli en dehors et à côté du "travail" proprement dit. Ce travail intellectuel n’a pas à faire l'objet d'une commande car il est accompli en plus et à côté du travail demandé et (plus ou moins) payé par l’entreprise. Il n’a pas d’usage social immédiat et ne donne pas lieu à rémunération. C’est avant tout un effort de prise de distance par rapport aux contraintes et aux exigences immédiates de la "situation de gestion" dans laquelle le jeune professionnel est immergé.

La démarche proposée se décompose en cinq opérations principales :

1/ " Accéder au stage " et se faire admettre dans un milieu de travail, en s’adaptant tout en préservant ses possibilités d’analyse.

2/ "Voir ce qui se passe " , c’est-à-dire trouver une position d’observation commode dans l’entreprise et une " posture d’analyse " compatible avec le parcours biographique du stagiaire (ses dispositions et ses aspirations) et avec les rôles professionnels (plus ou moins formalisés) qu’on lui demande d’assumer. 

3/ " Garder trace de ce que l’on voit ", c’est-à-dire noter ce qui se passe, tenir un " journal de bord " et collecter les documents émis, reçus ou activement recherchés.

4/ " Ecrire sur son expérience ", c’est-à-dire reconstituer un processus (de vente, de gestion, de production, d’innovation, etc.) auquel on a participé activement, d’un état initial à un état final (en tenant compte du fait que le début et la fin du processus ne coïncident pas toujours avec les dates d’arrivée et de départ du stagiaire).

5/ " Publier et discuter ses résultats ", c’est à dire traiter avec tact et efficacité les questions délicates comme celle des engagements, des censures et de la liberté d’expression.

L’étape initiale d’une recherche académique classique, la " formulation de la problématique " est délibérément écartée comme non pertinente, tout comme elle était absente du manuel classique de Schatzman et Strauss (1973) écrit dans la tradition américaine issue de " l’école de Chicago " et prolongée dans " l’interactionnisme ". L’étudiant ne choisit pas ce qu’il lui sera donné d’étudier dans l’entreprise. Il ne connaît pas d’avance la thématique qu’il aura l’occasion d’approfondir : elle émergera peu à peu au cours de l’expérience pour se cristalliser en fin de stage, à la sortie de l’entreprise. C’est alors seulement qu’il sera possible d’identifier le phénomène étudiable, de faire une recherche bibliographique et de sélectionner les éléments pertinents dans la masse des données recueillis de façon extensive au cours du stage.

L’étape finale, " publication des résultats ", est délibérément formulée de telle sorte que l’école se donne une exigence de production de connaissances, qu’elle pousse l’étudiant à aller un peu au-delà des obstacles redoutables qu’oppose à l’étude une collectivité aussi soucieuse de son image et de ses secrets que l’est une entreprise privée. Je me suis moi-même efforcé de satisfaire à cette exigence dans les deux livres où je rends compte de mes expériences professionnelles en tant que consultant et manager. Ma démarche de praticien-chercheur d’abord " immergé " puis " prenant ses distances " à été semblable à celle que Melville Dalton avait adoptée et préconisée dans son étude classique sur les cadres.

Le travail d'analyse des données, d'écriture et de discussion des résultats gagne à être effectué dans un lieu extérieur à la situation de gestion (une université) et en présence de personnes qui n'y sont pas impliquées (d’autres étudiants, des professeurs). Ainsi s’instaure une dynamique délicate et féconde entre les exigences de l’entreprise et les exigences académiques.

Grâce aux documents recueillis sur le vif et qui constituent des traces du processus, le travail ultérieur de réflexion, de prise de distance, d'écriture et de délibération sur l'expérience vécue devient possible et peut conduire, éventuellement, jusqu'à l'objectivation de l'expérience qui permettra d'inscrire les résultats dans une tradition scientifique et de les publier.

Les résultats : certaines études directes n'ont d'autres fonctions que de contribuer à l'apprentissage ou d'apporter un regard neuf sur une situation particulière. Un tel savoir, local et circonstancié, prend toute son importance si l'on se place dans le contexte d'une société décentralisée où le principe de subsidiarité est mis en pratique et où chacun peut se faire sa propre idée des affaires qui le concernent (et qu'il connaît "de première main"), afin de prendre des initiatives.

Si on les pousse jusqu'à leur terme, les études directes apportent une contribution à la connaissance scientifique. En effet, les descriptions de processus que l'on obtient selon cette démarche sont plus précises et mieux fondées qu'un simple témoignage autobiographique (l'illusion rétrospective peut être contrôlée grâce aux notes et documents recueillis sur le vif). Ces descriptions sont aussi plus précises et plus fiables que les résultats obtenus par les sociologues au travers le filtre des interviews qui ne sont eux-mêmes que des témoignages dépendant de la mémoire des personnes interrogées et de leur perception des enjeux du questionnement savant.

Quelques conditions pédagogiques et institutionnelles de mise en œuvre d’un tel programme.

N’enseignant pas moi-même dans les deux premiers cycles universitaires, je suis assez mal placé pour discuter de la faisabilité d’une démarche pédagogique de ce type et pour l’adapter au cadre universitaire. Je peux néanmoins évoquer brièvement les principales difficultés que l’on rencontre dans les grandes écoles.

Problème de calendrier et d’horaires : il faut toujours beaucoup de temps aux étudiants pour écrire et réécrire, et souvent un " atelier d’écriture " (en petits groupes) est nécessaire pour qu’ils puissent progresser.

Problème de contrainte de l’écriture : si des représentants de l’entreprise interviennent dans le jugement sur le travail intellectuel de l’étudiant, celui-ci s'autocensure et substitue un discours d’opportunité à une recherche de la vérité afin d’augmenter ses chances de trouver un emploi.

Partout où le travail des enseignants se compte seulement en " heures de cours " l’encadrement individualisé des étudiants effectuant une étude directe de leur expérience au travail ne fait pas partie du service obligatoire et entre en compétition avec les autres activités des enseignants. La distinction malheureuse entre " cours magistral ", TP et TD accentue encore l’effet de dissuasion, puisqu’elle incite les enseignants les plus titrés à fuir le travail en petits groupes et le suivi individualisé.

Les étudiants ramènent à l’école ou à l’université une mine d’informations de première main sur les entreprises et les marchés, mais cette mine ne vaut rien si les comptes rendus sont mal rédigés, mal titrés, mal indexés, mal classés et perdus parce que la bibliothèque " n’a pas de personnel disponible pour s’occuper de ça ". La réussite d’un tel projet ne sera pourtant assurée que si les enseignants attendent des stagiaires des résultats utiles à la recherche : un gage de sérieux, d’exigence et d’implication.

Enfin, il peut arriver que des professeurs qui n’ont jamais travaillé en entreprise et qui n’ont pas l’expérience de l’enquête de terrain proposent aux étudiants des " méthodologies " inadaptées à la réalisation d’une étude de terrain sur les lieux de travail.

La combinaison de plusieurs de ces difficultés réduit à néant l’effort des étudiants pour donner sens à l’expérience qu’ils vivent au travail et nous prive du bénéfice intellectuel de leur contribution.

Conclusion

On reproche souvent aux études de sociologie d’être trop académiques, trop théoriques, trop livresques. En préparant des étudiants à faire la sociologie de leur monde, tel qu’il est, et aussi éloigné soit-il du style de vie des fonctionnaires et des enseignants, il me semble qu’on répond à cette objection.

On reproche souvent aux études de sociologie de n’assurer de débouchés professionnels conséquents qu’à la toute petite minorité d’étudiants qui obtiendra les rares postes offerts par la fonction publique. L’étude attentive des emplois qui sont réellement à la portée des étudiants - tels qu’ils sont - répond à cette objection. Elle apporte un service et une valeur ajoutée même aux plus défavorisés. En travaillant avec eux et à fond sur les travaux qui leur sont accessibles, on leur fournit les moyens intellectuels d’investir et de transformer les emplois bien réels qu’ils ont ici et maintenant, au lieu d’espérer en vain un débouché chimérique et inaccessible.

Enfin, en affirmant que la sociologie est avant tout une pratique et qu’on ne peut former des sociologues que par la pratique, ne se donne-t-on pas un programme pédagogique exigeant qui justifie les moyens afférents, en particulier, la possibilité d’assurer dès le premier cycle des enseignements par petits groupes, voir individuels, et de disposer des moyens (secrétariat, téléphone, fax, informatique, reprographie, salles de réunion et de travail, moyens d’enregistrement et d’archivage) indispensables à toute formation par la pratique ?

Michel Villette

Quelques remarques à propos de la nécessaire "adaptation" au nouveau public.

Sandrine Garcia, Agnès Pélage,
Université de Savoie,
département de sociologie.

La thématique de l'adaptation aux nouveaux publics, qui sous tend un certain nombre de problématiques officielles sur les nécessaires transformations du système éducatif véhicule parfois une vision de l'adaptation essentiellement fondée sur une logique de la remédiation, qui va de pair avec une lecture des difficultés des étudiants ou des lycéens issus des classes populaires comme étant d'abord des difficultés cognitives. Or, nous avons constaté qu'avant les difficultés cognitives, on rencontre d'autres difficultés qui peuvent s'y cumuler et que nous analysons en termes de "déréalisation des exigences scolaires" et "absence de clarté de la définition de la situation pédagogique".

Une partie des étudiants du public de sociologie de première année, déjà intellectuellement désarmée face à la culture universitaire, souffre avant tout de difficultés à s'auto-contraindre : s'auto-contraindre à suivre des cours alors que leur absence n'est pas sanctionnée, à prendre au sérieux les exigences des enseignants, à mettre en cause la nature de leur investissement intellectuel dans les notes qu'ils obtiennent, etc. Pour cette partie là des étudiants, il s'agit de "passer" chaque année, au besoin en négociant les notes avec les enseignants mais sans s'engager dans leur formation. La moindre exigence pédagogique suscite chez eux un sentiment d'injustice et des protestations à n'en plus finir : s'ils ne suivent pas les cours et ne fournissent pas le travail demandé, c'est que les cours ne sont pas intéressants et les enseignants pas assez compréhensifs... Ces étudiants trouvent un écho dans une certaine logique clientéliste qui veut que si tous les cours étaient intéressants, l'auto contrainte ne serait jamais nécessaire. Sans doute ces étudiants correspondent-ils à la deuxième catégorie de "touristes" définis par A. Barrère dans sa thèse, sur le travail scolaire des lycéens. La définition de la situation pédagogique n'est pas claire pour ces étudiants dans le sens où ils pensent qu'ils pourront jouer indéfiniment dans les interstices du système, c'est-à-dire obtenir des passages plus ou moins disjoints des performances scolaires.

Interpréter l'échec de ces étudiants là du seul point de vue "cognitif" les maintient dans la déréalisation des exigences scolaires. Il faut d'abord transformer leur rapport à la réalité scolaire, et pour cela, leur faire admettre que les exigences scolaires sont incontournables et qu'elles sont sanctionnées clairement. D'abord, il importe que la définition de l'université comme lieu de transmission et d'appropriation des savoirs soit claire pour ces étudiants, ce qui va à l'encontre des tentatives actuellement opérées pour la définir avant tout comme un "lieu de vie étudiante" ou "d'exercice de la citoyenneté". Qu'un lieu de transmission des savoirs mérite d'être agréable à vivre ne doit pas entraîner cette confusion entre "lieu de vie" et "lieu de transmission des savoirs" préjudiciable aux étudiants qui ne disposent pas d'héritage culturel scolaire suffisant et qui ont plus que d'autres besoin de cette transmission. Le fait de s'engager dans des associations pour une amélioration légitime des conditions de vie et de travail à l'université ne peut pas dispenser d'être d'abord un "apprenant".

C'est un certain nombre "d'expériences pédagogiques" que nous avons menées dans le cadre d'enseignement de première année de DEUG de sociologie qui a permis de constater qu'avant de traiter les difficultés cognitives il fallait d'abord rendre réelles (et pas seulement réalistes !) les exigences scolaires. Habitués à un public plutôt faible scolairement, mais généralement doté d'une bonne volonté culturelle, nous nous sommes aperçus qu'une partie des étudiants qui nous arrivaient n'étaient même plus d'accord sur le fait de se soumettre à des exigences scolaires. Un tel pré requis rendait particulièrement malaisée toute action pédagogique, alors que les étudiants qui sont (seulement) en difficulté cognitive profitent d'emblée d'une rationalisation de la pédagogie, même si les résultats scolaires peuvent prendre une année ou deux pour vraiment "décoller". Constatant l'année dernière, au moment de l'évaluation des étudiants de DEUG 1 une nette aggravation des difficultés à l'écrit d'une partie d'entre eux et connaissant le rôle de la lecture dans l'élaboration cognitive, nous avons décidé de faire entrer la lecture d'ouvrage dans le contrôle des connaissances, en leur donnant comme consigne qu'ils devaient dans les dissertations des partiels de juin mobiliser l'ouvrage obligatoire. Nous avions choisi un livre simple mais dont la connaissance effective était particulièrement repérable. Avant les partiels, nous avions explicité les critères de l'évaluation, indiquant que ceux qui n'avaient pas lu le livre n'auraient pas la moyenne et que citer le livre ne comptait pas pour l'avoir lu. Ainsi, un barème de notation avait été présenté aux étudiants en indiquant clairement qu'un devoir qui ne reposerait pas sur la connaissance du livre ne pourrait obtenir une note au delà de 8 sur 20. Après correction des copies, nous avons constaté avec une certaine surprise que la plupart des étudiants, pourtant avertis autant qu'ils pouvaient l'être, ont considéré comme dénuée d'importance l'obligation de lecture : ils ont massivement cité le livre, et ont "raconté" ce qu'il y avait dedans sans manifestement en avoir lu la première page. En revanche, du point de vue des acquisitions cognitives de ceux qui "avaient joué le jeu", l'expérience était satisfaisante. Les étudiants faibles du point de vue de la maîtrise de la langue et qui avaient eu des résultats désastreux lors de la première évaluation (basée sur la seule connaissance du cours), se sont bien approprié un savoir, en même temps qu'une manière de l'exprimer. Ils ont obtenu des résultats légèrement meilleurs que ceux qui manifestaient une grande aisance à l'écrit mais qui avaient eux aussi "dérobé", et du coup, avaient été contraints de faire du hors sujet. La consigne d'obligation de lecture (du même ouvrage) a été maintenue pour septembre et, malgré cela, une partie des étudiants a continué à la juger facultative, avec les résultats qui s'en sont suivis.

C'est par cette expérience que nous avons mesuré toute l'ampleur de la déréalisation des exigences scolaires pour ces étudiants, avec des conséquences pédagogiques importantes : comment agir sur l'activité cognitive d'étudiants qui manifestement étaient habitués à négocier les notes, autrement que par leur activité cognitive ? A quoi ressemblaient nos tentatives et celles de nos collègues de faire admettre à ces étudiants l'intérêt du tutorat, des techniques d'expression écrite etc. ? Les exigences scolaires n'avaient tout simplement aucune réalité pour eux. Bien sûr, chaque année les enseignants sont confrontés à l'absence de travail de certains étudiants, de cela nous ne nous étonnons pas. Non, ce qui nous interroge sérieusement c'est bien l'attitude vis-à-vis du travail universitaire demandé et les pratiques étudiantes qui en découlent.

Aussi l'année suivante, alors avec une collègue, nous avons décidé de mettre en œuvre une stratégie consistant à instaurer "un rapport au réel scolaire" auprès de notre "nouveau public" de première année de DEUG. Nous avons mis en place, dès la session de février, des oraux portant sur la lecture d'un livre, et qui comptaient à 50 % de l'examen d'une unité de valeur, le reste étant constitué de notes de T.D et d'un examen sur table. Trois notes validaient donc leur session du premier semestre. D'octobre à fin janvier, deux heures de permanence par semaine étaient réservées aux étudiants susceptibles de demander des explications à l'enseignant sur les lectures obligatoires (articles et ouvrage) : seuls deux étudiants sur les 198 inscrits les ont mises à profit. Au cours des oraux, nous avons constaté que davantage d'étudiants avaient pris au sérieux la consigne de lecture et nous avons été étonnées de constater à quel point des étudiants pouvaient s'approprier des contenus. La règle du jeu de l'oral était "Racontez-moi ce qu'il y a dans le livre de..." et nous avions ensuite une grille de questions permettant très précisément de s'assurer de la lecture et du degré de compréhension. Les questions permettaient de "sauver" les timides (mais qui avaient quand même travaillé) et de confondre les "bluffeurs". Quelques questions auxquelles le livre ne répondait pas, mais auxquelles on pouvait répondre si on avait lu le livre, permettaient de vérifier qu'il s'agissait bel et bien d'une appropriation, et pas seulement d'un apprentissage "formel". Nous n'avons d'ailleurs pas hésité en cours à expliciter ce qu'est une lecture et la nécessité de la prise de note. Les étudiants qui étaient en "grande difficulté scolaire" mais qui avaient "joué le jeu" ont eu des notes entre 8 et 11. D'ailleurs nous avons choisi d'utiliser l'ensemble de l'échelle de notation, les notes des étudiants se sont ainsi étalées de 0 à 19, avec une moyenne de 9,5.

L'expérience a été très révélatrice, car nous avons pu observer des stratégies d'étudiants qui ne peuvent que résulter d'une socialisation antérieure : nous avons avec une grande surprise constaté que, même en face d'un enseignant, une partie des étudiants n'hésitaient pas à inventer ce qu'il y avait dans un livre qu'ils n'avaient manifestement jamais ouvert, qu'ils n'hésitaient pas non plus à se présenter sans avoir lu ou qu'ils venaient à l'oral en espérant "vendre leur handicap socioculturel" : "ma mère ne parle pas français, je viens d'un milieu immigré, etc.". Ou aussi : "je ne sais pas ce qu'il y a dans le bouquin, mais je devais voir ma copine qui devait me raconter l'histoire ". Ou encore, justifiant de leur présence sans être capables de restituer ni cours, ni lecture ni connaissances : "quand même j'ai fait l'effort de me lever pour venir".

Après les oraux, nous avons remarqué une présence accrue des étudiants en cours dans les cours sanctionnés par l'oral et une attention plus grande de leur part, ils posaient des questions et n'arrivaient plus en retard (que nous n'admettons pas au delà de 10 minutes). Ainsi pouvons nous penser qu'après cette expérience, ils prenaient (davantage) au sérieux leur formation et qu'ils prenaient goût à des contenus qui étaient de véritables contenus. Sans avoir la naïveté de croire que la voie de la réussite à l'université était enfin trouvée, nous commencions à faire le pari qu'on observerait moins d'auto élimination et d'échecs sans cette déréalisation des exigences scolaires dont l'université hérite très largement.

L'auto-élimination des étudiants qui se traduit par un fort taux d'abandon des étudiants dès les premières semaines d'enseignement se double de résultats aux examens trop souvent faibles voire très faibles. Ce sont ces deux points noirs que nous avons à interroger et qui justement sont au cœur de la logique de gestion des flux qui caractérise la politique actuelle du système scolaire et qui se dessine à l'université.

Outre leurs désavantages, réels, ces étudiants là sont très largement victimes d'une logique de gestion des flux qui dans le secondaire, a tenu lieu de démocratisation. Il en résulte un écart entre la certification et le niveau requis qui se révèle au moment des premiers examens universitaires, ce que Stéphane Beaud a appelé "l'heure de vérité" dans des articles consacrés aux lycéens en sursis. Une partie des étudiants ne sont pas en échec à l'université comme on le dit fréquemment, ils y sont arrivés en échec, et pâtissent en premier chef de cette immense liberté qui leur est laissée (de s'auto-éliminer ?). Le plus dommageable est que la logique de gestion des flux (on fait passer l'élève quelle que soit la maîtrise des savoirs requise) a eu des effets sur la seule chose dont les enseignants qui veulent agir sur leurs difficultés ne peuvent se passer : leur engagement dans le travail intellectuel. Certains étudiants qui ont traversé tout le système scolaire sans jamais rencontrer vraiment d'exigences qui se traduiraient en termes "d'obligation de se mettre au travail", manifestent une forme de rationalité qui consiste à s'adapter à un système qui ne leur demande rien, (tout en leur faisant savoir qu'ils ne sont pas des "vrais" étudiants ou lycéens).

Qu'on nous comprenne bien : nous ne voulons surtout pas dire que "le niveau baisse" parce que des populations qui en étaient autrefois exclues entrent au lycée (et après à l'université). Nous voulons dire que pour afficher des taux de réussite élevés (et réaliser des économies budgétaires) l'administration a exercé sur les enseignants, via les parents d'élèves et les Chefs d'établissement, des pressions pour ne pas sanctionner les exigences scolaires annoncées par des programmes scolaires qui restent très ambitieux, voire élitistes dans certains cas. Du coup, c'est un rapport au réel qui n'est plus assuré par l'institution. Pour agir sur leurs difficultés cognitives, qui existent aussi, il faut parfois réinstaurer ce rapport au réel. On peut proposer à ces étudiants des procédures de remédiation qui correspondent à leurs "besoins", mais s'ils ne sont pas dans ce rapport là au réel, ils se déroberont tout simplement (n'iront pas au tutorat, manqueront les séances consacrées à la construction du devoir, déserteront les cours, etc.). Aussi la question du "sens" est-elle très souvent mal posée : c'est en "découvrant" le sens qu'une rencontre peut se produire entre un étudiant et un livre, par exemple, de sociologie. Mais si l'étudiant n'ouvre jamais le livre, il ne risque pas de découvrir quoi que ce soit. Et s'il ne le fait pas spontanément (ce qui serait bien sûr l'idéal), il faut user de ce rapport instrumental au savoir qu'ont bien décrit certains sociologues de l'éducation, et ne surtout pas lui donner de notes qui ne correspondent pas à un engagement réel dans un travail intellectuel. Les oraux, avec lecture obligatoire et évaluation sur ces lectures, peuvent produire un effet de socialisation scolaire tout à fait positif : ils peuvent être l'occasion d'invalider les stratégies estudiantines de contournement des contraintes (ou d'acceptation minimale) en les payant immédiatement de retour. En outre, ils permettent de "spécifier" justement le type de difficulté des étudiants et de déterminer si elles sont essentiellement cognitives (on voit que l'étudiant a lu le livre, mais sa compréhension reste limitée), liées à la déréalisation des exigences scolaires (l'étudiant n'a pas lu le livre) ou à la manière dont sont effectuées les tâches scolaires (l'étudiant fait ce qu'il faut "formellement", mais il ne s'engage pas intellectuellement dans ces tâches, il fait son métier d'élève sans se constituer en élève apprenant).

Réinstaurer ce rapport au réel ne veut pas dire que l'on se dispense de rationaliser autant que faire se peut la pédagogie : il est clair qu'un public qui arrive déjà très désarmé intellectuellement ne sera pas aidé par une pédagogie fondée sur l'implicite, un cours dont on ne perçoit pas la direction ou des exigences non explicitées. Il faut donc à notre avis se défaire d'une vision compatissante des classes populaires qui ne peut guère produire d'ajustement positifs pour les étudiants (comme "on ne peut plus faire du théorique avec eux", "on ne peut pas leur demander de lire", "d'écrire correctement", etc.) et, qui, en fin de compte, les infériorise objectivement. Mais il faut aussi leur offrir des cours structurés, s'assurer qu'on leur laisse le temps de prendre des notes, expliquer ce qui leur fait problème, expliciter les exigences pédagogiques, faire consulter les copies, donner des retours etc. Et leur faire comprendre qu'ils n'auront pas le choix (de se mettre au travail ou de ne pas se mettre au travail), ne manifester aucune indulgence à l'égard de stratégies mises en œuvre dans le secondaire avec succès et qui ne font que différer l'échec : négociation de notes, d'exigences, de délais, d'absence aux T.D (quand ceux ci sont obligatoires), etc. Cette exigence suppose évidemment une forte exigence envers nous-mêmes, notamment dans la préparation des cours et la clarification des exigences pédagogiques.

Cela suppose, bien sûr, d'être davantage attachés à faire réussir ces étudiants là qu'à des logiques de gestion des flux telles qu'elles prévalent dans le secondaire (qui mesurent la démocratisation en termes de pourcentage) et de renoncer à se faire un public "à bon compte" avec, en plus, la bonne conscience de ne pas être "élitiste". Car ces étudiants là sont capables d'adaptation : si les exigences se présentent comme incontournables et qu'elles sont rendues réalistes par une pédagogie "rationalisée" ils s'ajusteront aussi au réel, même s'il leur faudra un peu de temps pour admettre déjà que ces exigences sont incontournables et un peu de temps pour vaincre des difficultés cognitives. Le populisme (mettre des notes qui visent à ne pas "décourager" les étudiants, mais disjointes de leurs productions scolaires) ou la logique gestionnaire (faire passer des étudiants pour s'assurer la "clientèle" nécessaire pour "faire tourner" la boutique) ont pour effet de condamner ces étudiants à constater qu'ils ont des lacunes fondamentales trop tard pour pouvoir agir efficacement sur elles. Il prive les étudiants d'une rencontre intellectuelle avec la discipline, qui suppose un véritable travail et d'habitudes (de concentration, de réflexion, d'affrontement de la difficulté) qui leur seront toujours utiles quoiqu'ils fassent après leur DEUG ou leur licence.

Même si elles sont aujourd'hui minoritaires dans l'enseignement supérieur (encore que ?), ces logiques risquent fort de s'accentuer avec les pressions qui vont dans le sens d'une "école efficace". Même du point de vue de la seule logique instrumentale des études, n'importe quel concours suppose de savoir rédiger à peu près un devoir. On pourrait avoir des pourcentages très élevés de "classes populaires" à l'université et à des niveaux élevés sans qu'il n'y ait pour autant de démocratisation, dans le sens où le monopole des savoirs par un petit nombre resterait absolument intact : la sélection se ferait alors davantage (se fait déjà) au moment des concours. Cette réflexion sur la déréalisation des exigences scolaires ne signifie pas que les enseignants du supérieur "bradent" aujourd'hui les diplômes, mais qu'un certain nombre de pressions risquent de les y inciter à l'avenir et qu'elles commencent à se faire sentir (notamment dans la presse syndicale, toujours accrochée à des critères statistiques de réussite mais aussi au niveau du ministère). Plus concrètement on peut d'ores et déjà noter quelques signes inquiétants : l'interrogation sur le renouvellement de contrats de vacataires en débat lorsque l'enseignement concerné "note trop bas", l'existence de réunions autour de l'évolution statistique, sur quelques années, de la moyenne des étudiants par matière et par module (UE).

De telles pressions ont d'autant plus de prise qu'elles s'appuient sur des critères que nous reconnaissons globalement : la démocratisation du système éducatif, la lutte contre l'échec scolaire, etc.). Nous risquons d'autant plus d'y être sensibles que nous avons en sciences humaines une sorte de tradition d'indulgence, qui se traduit parfois par des notations peu significatives (mettre 8 pour un devoir "nul" et 13 pour un bon). La mise en place de critères d'évaluation des universités fondés sur leur efficacité (avec conséquences budgétaires) peuvent inciter une partie d'entre nous à accorder exigences institutionnelles (logiques de gestion des flux) et bonne conscience politique (logique populiste) au détriment des étudiants "stockés" dans le système éducatif jusqu'à découvrir qu'ils n'ont en fait qu'une faible valeur scolaire.

Les "moyens" et la remédiation ne suffiront pas à régler la question de la "déréalisation" des exigences scolaires, même s'ils sont souhaitables et nécessaires. Couplée à une rationalisation de la pédagogie universitaire, l'instauration d'exigences scolaires incontournables constitue une manière novatrice de "faire avec" ce nouveau public sans lui manifester une indulgence qui n'est que la forme masquée du mépris social ou/et de l'indifférence vis-à-vis de leur avenir. Alors bien sûr la sociologie est particulièrement confrontée à l'accueil de ces "nouveaux publics" mais plus que de les accueillir elle se doit de les former. Il en va de notre responsabilité, à nous enseignants du supérieur, vis-à-vis de la discipline sociologique qui souffre d'une orientation par la négative, comme, oserons-nous le dire, du métier de sociologue. Et c'est bien ce métier que nous avons choisi d'exercer, il n'y a pas si longtemps que cela.

Sandrine Garcia, Agnès Pélage

INFORMATIONS SUR LE CNU,
19e SECTION
Sociologie, démographie

Bilan des qualifications aux fonctions

de maître de conférences et de professeur, 1999

Alain Chenu
Président de la 19e section du CNU
(Sociologie, démographie)

 

 

La 19e section du CNU a siégé pendant trois journées et demie pour la qualification des maîtres de conférences et un peu plus d’une journée pour celle des professeurs. Chaque rapporteur avait eu à examiner environ 19 dossiers.

Lorsque les avis des deux rapporteurs étaient favorables et qu’aucun membre de la section n’avait de réserve à exprimer, les rapporteurs présentaient généralement une version condensée de leur analyse du dossier ; de la sorte, en l’absence d’avis contraires de la part des collègues non rapporteurs, les autres cas pouvaient être examinés de manière moins succincte. Il avait été convenu en début de session que les décisions acquises à une courte majorité seraient réexaminées au vu de l’ensemble des cas traités, ce qui a été fait pour trois dossiers de maîtres de conférences et a abouti à un renversement au bénéfice d’une candidate qui avait d’abord été écartée.

Qualification aux fonctions de maître de conférences

Le chevauchement entre le calendrier des soutenances et celui de la procédure de qualification s’est traduit par de nombreux abandons de candidatures. Les 33 abandons sont souvent le fait de candidats n’ont pas pu soutenir une thèse dans les délais qu’ils avaient prévus. Bien peu parmi eux ont eu l’amabilité de prévenir du retrait de leur dossier les rapporteurs que le bureau de la section leur avait assignés.

D’assez nombreux dossiers étaient lacunaires - curriculum vitae incomplet, thèse manquante, rapport de soutenance partiellement signé. Souhaitons qu’en l’an 2000 le site Internet du ministère de l’Education nationale, de la recherche et de la technologie diffuse des consignes spécifiques à chaque section du CNU.

La principale difficulté rencontrée au fil de cette session tient, de manière encore plus nette que les années précédentes, au fait que des jurys de thèse attribuent à l’unanimité la meilleure mention possible et signent un rapport de soutenance laissant entrevoir de graves faiblesses dans le dossier du candidat. Les rapporteurs et le CNU sont alors amenés à reprendre au moins en partie le travail que le jury de thèse n’a pas fait de manière satisfaisante.

Comme lors des précédentes sessions, le niveau d’exigence du CNU en matière de publications a été fonction de l’âge des candidats. Un bon rapport de soutenance, un peu d’expérience d’enseignement de la sociologie et un dossier de publications à peu près vide forment un dossier acceptable à trente ans, insuffisant à quarante. L’absence d’expérience en matière d’enseignement est un obstacle fort à la qualification, mais des candidats ayant réalisé leur thèse dans des conditions particulières d’éloignement ont pu être qualifiés.

Sur 254 candidats ayant présenté un dossier complet, 137 - soit 54 % - ont été qualifiés. 21 candidats avaient déjà essuyé un refus en 1998, 7 d’entre eux ont été qualifiés.

L’âge moyen des qualifiés est de 35,9 ans (35,8 en 1998, 39,3 en 1992), celui des non qualifiés atteint 40,4 ans. Ages médians : 34,5 pour les qualifiés, 39,5 pour les non qualifiés.

Les candidates sont qualifiées à 62 %, les hommes à 42 %. L’écart se creuse en faveur des femmes : en 1998 elles étaient qualifiées à 60 %, les hommes à 49 %. En 1992 les taux étaient identiques pour les deux sexes.

69 % des candidats ayant soutenu leur thèse en 1998 ou 1999 obtiennent leur qualification. Le taux passe à 35 % pour les autres.

Parmi les thèses nouveau régime postérieures à 1992 et dont la mention est connue, près de sept sur dix avaient obtenu la meilleure mention, Très honorable avec félicitations. Même si cette mention suprême est distribuée de manière libérale, le taux de qualification est largement fonction de la mention :

Qualification

Taux de qual.

Mention

Oui

Non

Total

(%)

Honorable

0

4

4

0

Très honorable

19

35

54

35

Très honorable avec félicitations

88

39

127

69

Le taux de qualification atteint 71 % pour les candidats dont le directeur de thèse est sociologue ou démographe, et 33 % pour les autres.

Discipline du

Qualification

Taux de qual.

directeur de thèse

Oui

Non

Total

(%)

Sociologie, démographie

100

41

141

71

Ethnologie, préhistoire

13

16

29

45

Science politique

11

11

22

50

Histoire, géographie, amén.

5

16

21

24

Sciences de l'éducation

3

7

10

30

Science économique

3

6

9

41

Autres, indéterminés

2

20

22

9

Les taux de qualification sont au total identiques en province et dans la région parisienne.

Qualifiés et non qualifiés selon l’établissement de soutenance de la thèse

Etablissement ou ville de soutenance

Oui

Non

Total

Etablissement ou ville de soutenance

Oui

Non

Total

Paris Ehess

29

13

42

Rennes 2

4

1

5

Paris 8

9

11

20

Nantes

3

1

4

Paris 5

11

8

19

Picardie

2

2

4

Paris 1

7

11

18

Toulouse

1

3

4

Paris 10

10

5

15

Aix Marseille 2

2

1

3

Paris 7

2

7

9

Besançon

3

0

3

Paris 4

2

2

4

Caen

0

3

3

Paris 9

3

1

4

Rouen

1

2

3

Paris Iep

1

2

3

Aix Marseille 1

1

1

2

Paris 3

0

3

3

Bretagne occ.

1

1

2

Paris Ephe 5e

1

1

2

Ehess Marseille

2

0

2

Paris Mines

2

0

2

Montpellier 3

1

1

2

Lyon 2

7

4

11

Nancy 2

2

0

2

Bordeaux

4

4

8

Tours

0

2

2

Strasbourg

4

4

8

Autres établ. français

10

6

16

Toulouse 2

2

5

7

Etranger

6

4

10

Lille

2

4

6

Grenoble

2

3

5

Total

137

117

254

 

 

La liste nominative des qualifiés est la suivante.

Qualification aux fonctions de maître de conférences, 19e section du CNU, 1999

aquatias

sylvain

dufoix

stéphane

maguer

annie

attané

isabelle

eleta-de filippis

roxana

maillochon

florence

avenel

cyprien

fauguet

jean-luc

mallard

alexandre

baillard

sylvie

faure

laurence

malrieu

jean-pierre

baillet

dominique

faure

sylvia

mansfield

malcom

balac

ronan

favre-perroton

joëlle

mathieu

séverine

begot

anne-cécile

flanquart

hervé

menoret

marie

belhadj

marnia

fourage-bouqsim

christine

mespoulet-buono

denise martine

belkis

dominique

fourdrignier

marc

metzger

jean-luc

ben-ayed

choukri

frigul

nathalie

meunier

olivier

bergouignan

christophe

froidevaux

camille

meyer

vincent

bigot

hélène

gasparini

rachel

meyers

peter

billion-laroute

pierre

gaubert

jany

mirande

gisèle

boissière

thierry

geisser

vincent

monsavoir

magali

bonu

bruno

giard-bacle

fabienne

moulevrier

pascale

bouillaud

christophe

ginoux-pouyaud

corinne

muller

béatrice

bounajma

mouna

gobatto

isabelle

nachi

mohamed

boussard

valérie

golovtchenko

nicolas

noumen

robert

boutinot

laurence

gucher

catherine

nowik

laurent

breviglieri

marc

guénif-souilamas

nacira

ortar-manigault

nathalie

brochier

christophe

guichard-FAURE

catherine

pichot

lilian

buton

françois

guichard-claudic

yvonne

pizzi

giancarlo

carra

cécile

guigon-bougzoul

sylvie

procoli rochet

angela

carre

laurence

guillo

dominique

rafidinarivo-rakotolahy

christiane

carricaburu

danièle

heo

kieong

rautenberg

michel

cauchon

christophe

jacquot

lionel

raveneau

gilles

cesar

christine

jarousseau-paillat

hélène

reverdy

thomas

chaland

karine

jarrot

sabine

ricard-selva

marie-laure

challin

sandra

juhem

philippe

rigaut

philippe

charpentier

isabelle

kechichian-hocquard

anita

rist

barbara

charvet

marie

krief

pascale

roquet

pascal

chavanon

olivier

lahaye

didier

rosselin

céline

chavot

philippe

lallement

emmanuelle

sainsaulieu

ivan

chehhar

mohammed

lanzarini

corinne

saouter

anne

cichelli

vincenzo

le-bot

jean-michel

saunier

noella

clément

karine

le queau

pierre

schwint

didier

cognet

marguerite

lefebvre

philippe

siracusa

jacques

coulangeon

philippe

lempereur de saint pierre

caroline

souchard

nadine

danic

isabelle

lestage

françoise

tain

laurence

dartiguenave

jean_yves

liotard

philippe

tarrière-diop

claire

deboulet

agnés

loriol

marc

ténoudji

patrick

delorme

annick

losego

philippe

vannier

patricia

detrez

christine

louppe

peggy

vassort

patrick

divay

sophie

lutard-tavard

catherine

wintz

maurice

donadini

mireille

mackiewicz-SCHRYVE

marie-pierre

wojcik

marie-thér.

dubuisson

sophie

madonna

sandrine

 

Qualification aux fonctions de professeur

Sur 39 candidats ayant présenté un dossier complet, 19 (49 %) ont été qualifiés. La part des femmes est très faible : quatre candidates, dont trois qualifiées. L’âge moyen des qualifiés atteint 49,7 ans, ce qui est beaucoup (en 1998 il était de 48,4, en 1992 de 47,6). Les non qualifiés ont en moyenne 49,0 ans.

Qualification aux fonctions de professeur, 19e section du CNU, 1999

Aspe

Chantal

Joubert

Michel

Barbier

Jean-Claude

Kalaora

Bernard

Burnier

Michel

Lioger

Richard

Cade-Bercot

Régine

Michel

Barbara

Corten

André

Mispelblom

Frederik

Courpasson

David

Neyrand

Gérard

Cuin

Charles-Henry

Pedler

Emmanuel

Duran

Patrice

Tarot

Claude (h)

Godard

Francis

Thuderoz

Christian

Gueissaz

Albert

 

 

 

D’autres informations sur la 19e section du CNU sont disponibles sur le site Internet

http://www.univ-lille1.fr/cnu19

Alain Chenu

 

 

***

 

 

 

TRIBUNE LIBRE

Lucie Tanguy
Directeur de Recherches au CNRS
Université Paris X-Nanterre

Pierre Tripier
Professeur à l'Université de
Versailles-Saint Quentin-en-Yvelines

à

M. le Professeur Alain Chenu

Président de la 19e Section (Sociologie et Démographie) du Conseil National des Universités.

Paris le 15 Avril 1999

M. le Président, cher collègue et ami,

Nous voudrions vous faire part de notre étonnement et de notre émotion en apprenant que la 19e Section (Sociologie et Démographie) du Conseil National des Universités n'a pas qualifié notre collègue Jean Pierre Briand à la fonction de Professeur des Universités. En effet, connaissant les travaux de Jean Pierre Briand depuis au moins dix ans, ayant fait partie de son jury d'habilitation, cette nouvelle nous fait l'effet d'une immense méprise ou d'un cauchemar éveillé.

Nous comprenons bien - par expérience - qu'une instance de régulation du milieu scientifique comme le CNU doive utiliser des critères objectivables pour statuer sereinement. Ces standards ont pour finalité de vérifier que l'éthique scientifique et les exigences de la recherche ont été respectées dans les appréciations des jurys de thèse et d'habilitation. Or, l'intéressant problème que pose le cas de J.P. Briand est celui d'avoir, pendant plus de trente ans et dans sa note de synthèse, suivi un modèle scientifique incontestable. Mais, ce modèle n'est pas celui qui conduisait autrefois à la thèse d'Etat en Lettres et Sciences Humaines, et c'est ce qui a pu troubler la section du CNU, puisque les documents qu'il avait soumis à son jury d'habilitation et la composition même de son jury ont été jugés contestables, insuffisants et révocables.

Permettez que sur ce point et en tant que membres du jury, nous vous expliquions les raisons qui nous ont conduit sans hésiter à accorder l'habilitation à diriger des recherches à M. Jean-Pierre Briand. L'évaluation des enseignants-chercheurs en biologie, en chimie et en physique suivent des règles communes à ces trois disciplines : les productions résultent d'un travail en groupe, leurs publications sont signées collectivement, l'habilitation à diriger des recherches donne lieu à une note de synthèse courte mais substantielle dans laquelle les résultats sont rappelés avec un souci de densité et de concision. Enfin, la coutume veut que le plus gradé des collaborateurs de ce travail collectif soit dans le jury d'habilitation.

Donc le cas Briand est intéressant en ce qu'il montre l'existence de traditions scientifiques légitimes très différentes dans le sein même de l'Université en insistant sur la nécessité de soumettre un livre de synthèse signé par lui seul, le CNU de démographie et sociologie montre que le modèle de l'ancienne thèse d'Etat est toujours vivant dans les standards implicites des évaluateurs, même Si l'habilitation a été inventée pour en finir avec les inconvénients évidents que cette thèse d'Etat ne cessait de générer.

J.P. Briand est un innovateur par le contenu de son œuvre et les formes de coopération qu'il a dû privilégier pour tenir son programme scientifique. Il a travaillé pendant trente ans dans un " laboratoire sans murs " avec peu de moyens financiers pour produire - avec d'autres - des données inédites qui bouleversent l'analyse conventionnellement établie en matière de scolarisation en France. La portée de son activité scientifique peut être appréciée à la qualité des revues qui ont publié ses articles et à la valeur des relations tissées par lui avec d'éminents collègues nord-américains.

Donc, c'est bien parce que le " format " de présentation de ses travaux est celui des sciences les plus anciennes, que la 19e section du CNU refuse de l'inscrire sur la liste de qualification au poste de professeur.

Aussi cette lettre aux membres du CNU, à laquelle nous voudrions donner quelque publicité pour susciter un débat, est une invitation à ouvrir les normes d'évaluation vers celles qui prévalent dans des sciences dont le développement est incontestable, où l'on évalue avant tout la participation à l'effort de recherche collectif.

Veuillez croire M. le Président, cher collègue et ami, à l'expression de nos sentiments les meilleurs

Lucie Tanguy Pierre Tripier

CHRONIQUE INTERNET

Deux parties dans cette chronique : comment recevoir chez soi un mail professionnel ; l'aide que le catalogue imprimé de la Bibliothèque Nationale de France peut nous apporter.

Mail personnel et professionnel

Supposons que votre université vous ait doté d'une adresse de mail du type prenom.nom@univ-lieu.fr et que vous souhaitiez consulter votre courrier depuis chez vous. Pour pouvoir le faire, il faut préalablement que vous ayez chez vous une connexion par l'intermédiaire d'un fournisseur d'accès qui vous a donné l'adresse suivante nom@fournisseur.fr Avant de faire la tentative de lecture, il faut comprendre un certain nombre de concepts. A cette fin, je vous invite à étudier les options de votre propre logiciel de courrier : comme un des plus fréquent est eudora, je commente ce que l'on trouve en utilisant le menu tools d'eudora light, sous-menu options.

En cliquant sur Getting started (en haut à gauche) vous voyez apparaitre trois cases POP Account, Real Name, Return address : le Real Name contient votre nom et prénom en clair, POP Account et Return address ont le même contenu, votre adresse nom@fournisseur.fr.

Vous retrouvez les trois premières mêmes informations en cliquant sur le deuxième sous-menu Personal info. Par contre en cliquant sur le menu suivant Hosts, vous retrouvez le POP Account avec votre adresse mais SMTP avec une adresse différente, liée à votre fournisseur.

Le POP Account désigne l'intitulé du Post Office Protocol : c'est le nom de la boite aux lettres où est stocké le courrier qui vous arrive. Return adress désigne l'adresse à laquelle vos correspondants doivent répondre et en général c'est la même que précédemment. Enfin SMTP désigne le serveur chargé du Simple Mail Transfer Protocol, c'est à dire le fournisseur d'accès qui se charge de l'envoi des messages.

Dans votre université, votre Return adress va être votre adresse du type prenom.nom@univ-lieu.fr mais, pour récupérer votre courrier vous devrez demander au gestionnaire de votre site le nom (sous forme d'adresse xyz@truc.univ-lieu.fr) de la boite au lettre où est stocké votre courrier. Quand au serveur pour l'envoi des messages (SMTP), vous n'aurez pas à l'utiliser car vous ne pourrez pas envoyer depuis chez vous de messages à l'adresse de l'université : il faudra le faire sur votre lieu de travail.

Attention, ne modifiez pas le POP account de votre fournisseur d'accès car vous n'y auriez plus accès. Une solution simple consiste à recopier l'ensemble du répertoire Eudora (avec les sous-répertoires) dans un autre répertoire doté d'un autre nom, de faire les modifications d'options indiquées ci-dessous, et d'indiquer à votre outil de connexion (qui vous permet de choisir entre Netscape, Explorer et Eudora ou d'autres choses), que vous avez un nouvel outil dans le nouveau répertoire.

Options à modifier : comme vous avez tout recopié, il suffira simplement de modifier POP Account dans les trois sous-menus Getting started, Personnal Info et Hosts déjà vus, ainsi que dans le sous-menu suivant Checking mail en mettant dans ces quatre emplacements l'adresse de la boite au lettre de l'université qui vous sera donnée par votre gestionnaire de site sous la forme xyz@truc.univ-lieu.frxyz seront peut-être vos initiales ou une combinaison de lettres qui vous sera propre.

Votre Return address prenom.nom@univ-lieu.fr sera à placer dans les trois menus Getting started, Personnal info ainsi que peut-être pour des raisons formelles dans Sending mail qui correspond au courrier départ et bien que vous n'enverrez pas de courrier.

Enfin l'adresse du serveur d'envoi SMTP devra être mise à blanc (pour retirer celle que vous avez recopié par défaut) dans Hosts et dans Sending mail.

C'est tout ce qui est nécessaire mais deux conseils :

1) Dans Checking mail, cliquez donc sur Save Password : cela conservera la mémoire de votre mot de passe d'une session à l'autre. Je suppose qu'il n'est pas nécessaire à votre domicile de protéger votre courrier par un mot de passe.

2) Toujours dans Checking mail, cliquez également sur Leave mail on server qui conservera le message, que vous aurez lu chez vous, sur votre serveur à votre lieu de travail.

Contrairement aux apparences, c'est assez simple : en cas de difficulté, contactez votre gestionnaire de site puis votre fournisseur d'accès et enfin le signataire de ces lignes pour lui indiquer ses erreurs ou ses imprécisions.

Le catalogue imprimé de la BN

Le catalogue imprimé de la BN, en ligne depuis quelques mois permet de s'assurer rapidement de la correction d'une référence bibliographique (en français : pour l'anglais il faut voir à la bibliothèque du Congrès). De plus on a toutes les publications d'un auteur et on peut voir toutes les notices associées (par exemple ce qui concerne le préfacier).

L'adresse à utiliser est : www.bnf.fr ensuite cliquer sur BN.OPALE PLUS puis sur catalogue des imprimés puis sur connexion au catalogue puis sur recherche simple. On vous propose alors de sélectionner au moins un des trois critères d'auteur, de mots du titre, de mots du sujet.

A titre d'exemple, je veux savoir quand a été traduit en français Mind, Self and Society de Mead. Je mets donc Mead dans la rubrique auteur. Je clique sur lancer la recherche mais en réponse on me signale que la liste, dont j'ai les 20 premières, comporte 176 entrées. Il faut réduire la demande : comme Mead a pour premier prénom G., je tape Mead, G dans la rubrique auteur. Il n'y a plus que 10 entrées qui sont les suivantes (le mise en page est modifiée) :

10 entrées correspondent à votre recherche.

Mead, G C F

Mead, G R S

Imprimés / Cat. Général Auteurs (jusqu'en 1959)

Imprimés / Cat. Général Auteurs - Supplément (jusqu'en 1959)

Mead, George H

Mead, George Herbert

Mead, George Herbert (1863-1931)

Mead, George Robert Stow

Mead, Gerald

On sélectionne tout les George H et on a la liste suivante

8 notices correspondent à votre recherche.

1 Creative intelligence...

2 Mead, George Herbert L'Esprit, le soi et la société[?Mind, self and society, from the standpoint of a social behaviorist?], par George Herbert Mead. Traduit de l'anglais par Jean Cazeneuve, Eugène Kaelin et Georges Thibault. Préface de Georges Gurvitch. 1963

3 Wundt, Wilhelm (1832-1920) The Language of gestures 1973

4 Mead, George Herbert (1863-1931) anglais). 1962-] Mind, self, and society : from the standpoint of a social behaviorist 1962

5 Mead, George Herbert Movements of thought in the nineteenth century. George H. Mead. Edited by Merritt H. Moore 1962

6 Mead, George Herbert (1863-1931) The philosophy of the present 1980

7 Mead, George Herbert (1863-1931) anglais)] Selected writings 1981

8 Mead, George Herbert (1863-1931) anglais). 1962-] Works of George Herbert Mead 1962

On sélectionne la notice 2

Auteur(s) : Mead, George Herbert

Titre(s) : L'Esprit, le soi et la société [Texte imprimé][?Mind, self and society, from the standpoint of a social behaviorist?], par George Herbert Mead. Traduit de l'anglais par Jean Cazeneuve, Eugène Kaelin et Georges Thibault. Préface de Georges Gurvitch... Publication : Paris : Presses universitaires de France (Vendôme, Impr. des P.U.F.), 1963

Description matérielle : In-8 ? (23 cm), XII-332 p. 18 F. [D. L. 2679-63]

Note(s) : Bibliothèque de sociologie contemporaine

Autre(s) auteur(s) : Cazeneuve, Jean. 0680 Gurvitch, Georges. 0550 Kaelin, Eugène. 0680 Thibault, Georges. 0680

Notice n° : FRBNF33095348

Le bouton "Rebondir" vous permet d'afficher l'ensemble des entrées du catalogue liées à cet ouvrage.

Nombre d'exemplaires : 1

N° Exemplaire 1

Tolbiac - Rez-de-jardin - magasin

8- R- 53593 (19) support imprimé

On sait désormais tout sur ce livre et si l'on "rebondit" on a un regard sur toute la sociologie de l'époque.

***

Autre question : de quelle date est la première édition de Goblot, La barrière et le niveau ? Voici la réponse sous forme de tout ce qui est enregistré à la BN pour cet auteur :

17 notices correspondent à votre recherche.

1 Edmond Goblot,... La 2e symphonie de G. M. Witkowski, étude critique et analytique et quelques appréciations de la critique.1912

2 Goblot, Edmond Assises scientifiques, littéraires et artistiques, fondées par Arcisse de Caumont. 3e session. Caen, 4-6 juin 1903. Rapport sur les progrès de l'instruction en Normandie, par E. Goblot,... 1903

3 Goblot, Edmond (1858-1935) La Barrière et le niveau : étude sociologique sur la bourgeoisie française moderne 1984

4 Goblot, Edmond La Barrière et le niveau. Étude sociologique sur la bourgeoisie française moderne, par Edmond Goblot, correspondant de l'Institut, professeur de philosophie à l'Université de Lyon 1925

5 Goblot, Edmond La Barrière et le niveau. Etude sociologique sur la bourgeoisie française moderne, par Edmond Goblot, correspondant de l'Institut, professeur de philosophie à l'Université de Lyon 1926

6 Goblot, Edmond La Barrière et le niveau, étude sociologique sur la bourgeoisie française moderne, par Edmond Goblot. Préface de Georges Balandier. Nouvelle édition 1967

7 Goblot, Edmond (1858-1935) De Musicae apud veteres cum philosophia conjunctione 1898

8 Goblot, Edmond De Musicae apud veteres cum philosophia conjunctione, thesim Facultati litterarum parisiensi proponebat Edmond Goblot,... 1898

9 Goblot, Edmond Essai sur la classification des sciences, par Edmond Goblot,.. 1898

10 Goblot, Edmond Essai sur la classification des sciences, par Edmond Goblot,... 1898

11 Goblot, Edmond Edmond Goblot, correspondant de l'Institut, professeur d'histoire de la philosophie et des sciences à l'Université de Lyon. La Logique des jugements de valeur. Théorie et Applications 1927

12 H. Bouchet. Le Scoutisme et l'Individualité. Préface de Edmond Goblot 1933

13 Goblot, Edmond, correspondant de l'Institut, professeur à la Faculté des lettres de l'Université de Lyon. Le Système des sciences. Le Vrai, l'Intelligible et le Réel 1922

14 Goblot, Edmond,... Traité de logique. Préface de... Émile Boutroux,... 2e édition 1920

15 Goblot, Edmond,... Traité de logique. Préface de M. Emile Boutroux,... 1918

16 Goblot, Edmond,... Traité de logique. Préface de M. Emile Boutroux,... 9e édition 1952

17 Goblot, Edmond,... Le Vocabulaire philosophique 1901

On y voit les diverses éditions recherchées (1925, 1926, 1967, 1984) mais aussi les autres intérêts de Goblot dont la logique des sciences et la musique à travers ce mystérieux titre en latin qui donne :

Notice complète

Type : texte imprimé, monographie

Auteur(s) : Goblot, Edmond

Titre(s) : De Musicae apud veteres cum philosophia conjunctione, thesim Facultati litterarum parisiensi proponebat Edmond Goblot,...

[Texte imprimé] Publication : Lutetiae Parisiorum : F. Alcan, 1898

Description matérielle : In-8 ? , 62 p. et index

Notice n° : FRBNF30516167

Nombre d'exemplaires : 1

Exemplaire 1

Tolbiac - Rez-de-jardin - magasin

8- V- 27391 support imprimé

C'est la thèse complémentaire de Goblot, encore faite en latin. On peut y trouver, dans l'exemplaire de la bibliothèque Ste-Geneviève, la dédicace de l'auteur.

cibois@francenet.fr

***

 

 

 

 

Vie de l'ASES

Assemblée Générale annuelle du 20 mars 1999

Dans son rapport moral, Philippe Cibois, président de l'ASES rappelle les projets qui avaient été envisagés l'an dernier :

- politique de la recherche, DEA, rapports avec le CNRS : cette rencontre avec des représentants du Ministère et du CNRS a eu lieu en septembre 1998

- les publications des sociologues : rencontre de janvier 1999

- implantation régionale : une rencontre régionale a eu lieu à Aix, et une autre est prévue l'an prochain à Grenoble pour le Sud-Est.

- le nouvel annuaire préparé par Suzie Guth est annoncé pour bientôt.

Par ailleurs l'association est en croissance régulière (142 cotisations payées en 1996, 178 en 1997, 213 en 1998). La répartition géographique est la suivante :

Région parisienne 38,1%

Grand-Est 18,1%

Grand-Ouest 17,7%

Sud-Ouest 9,2%

Sud-Est 8,5%

Nord 8,5%

On voit là que le travail d'implantation dans le Sud est à poursuivre mais que l'éloignement de Paris, où se font les rencontres est un obstacle à une participation régulière.

Pour faciliter la participation aux réunions parisiennes, l'éventualité de choisir un autre jour que le samedi avait été envisagé et la questions avait été posée lors du renouvellement des cotisations. Cette consultation a donné les résultats suivants (sur 93 suffrages exprimés) :

maintien du samedi 50,5%

choix du vendredi 25,8%

alternance entre les deux jours 23,7%

Au vu de quoi nous maintenons le samedi pour les rencontres, sans exclure complètement le choix du vendredi s'il s'imposait pour des raisons pratiques (ce qui est d'ailleurs déjà arrivé).

***

Quels sont les problèmes qui se posent à notre milieu professionnel et qui peuvent être matière à débat pour l'ASES ? Certains, comme les problèmes pédagogiques font l'objet d'une discussion (rencontre du 20 mars 1999). D'autres sont à discuter :

1) la professionnalisation : faut-il aller dans le sens suggéré par Alain Chenu (Cf Lettre n°26, p.46) qui donne deux exemples de professionnalisation, soit celle des médecins et des psychologues avec une profession labélisée, soit celle des mathématiciens ou des physiciens "qui se positionnent comme représentants d'une discipline savante et enseignante et ne cherchent pas à ce que cette discipline soit organisée comme profession autonome en dehors du monde académique". La "ligne" défendue par Alain Chenu est plutôt la seconde, qui suppose que l'on insiste également sur la formation des futurs enseignants du secondaire. Le débat est à continuer au sein de l'ASES.

2) les rapports entre Université et CNRS : puisque le rapprochement est en train d'avoir lieu, ne faudrait-il pas que L'ASES soit également un lieu de réflexion sur cette question, ce qui suppose que les chercheurs puissent en tant que tels participer à nos travaux.

***

Le débat qui a suivi le rapport moral a permis de se rendre compte que ces deux problèmes devaient faire partie des préoccupations de l'ASES pour les années à venir. En effet l'évolution des équipes de recherche du CNRS en sciences humaines vers un rapprochement avec les universités ; l'évolution des DEA qui se constituent en écoles doctorales où les laboratoires de recherche sont la structure clé ; ces deux phénomènes vont dans le sens d'un rapprochement et l'ASES doit y réfléchir dans ses rencontres à venir.

***

Après audition du rapport financier par Michèle Dion, le rapport moral et le rapport financier sont approuvés à l'unanimité.

 

 

 

 

***

Assemblée Générale annuelle du 20 mars 1999

Rapport financier

 

Michèle Dion : trésorière

 

 

 

Bilan comptable pour l'année 1998

 

Recettes

213 cotisations 31 915,00

Recettes Sicav 928,00

Vente annuaire 560,00

----------------------------------------------------

Total recettes 33 403,00

Dépenses

Frais de déplacement 12 546,00

Frais d’envois 12 167,10

Lettres de l’ASES

----------------------------------------------------

Total dépenses 24 713,10

Recettes - dépenses 8 689,90

(solde créditeur)

Bilan de trésorerie

Situation au 31 décembre 1997

Sicav 36 091,20

CCP 25 099,71

---------------------------------------------------

Total au 31/12/97 61 190,91

Situation au 31 décembre 1998

Sicav 37 019,20

CCP 32 861,61

---------------------------------------------------

Total au 31/12/98 69 880,81

Total 1998 - total 1997 8 689,90

(solde créditeur)

 

Rappel de l’année 1997

 

Recettes

178 cotisations à 150F 26 700,00

Recettes Sicav 883,20

Vente annuaire 8 875,00

----------------------------------------------------

Total recettes 36 458,20

Dépenses

Frais de déplacement 16 119,00

Frais d’envois 6 540,50

Lettres de l’ASES 3 900,00

----------------------------------------------------

Total dépenses 26 559,50

Recettes - dépenses 9 898,70

(solde créditeur)

Bilan de trésorerie

Situation au 31 décembre 1996

Sicav 35 208,00

CCP 16 084,21

---------------------------------------------------

Total au 31/12/96 51 292,21

Situation au 31 décembre 1997

Sicav 36 091,20

CCP 25 099,71

---------------------------------------------------

Total au 31/12/97 61 190,91

Total 1997 - total 1996 9 898,70

(solde créditeur)

 

 

Compte-rendu du conseil d'administration
du 5 juin 1999

Présents : Régine Bercot, Yéza Boulhabel-Villac, Philippe Cibois, Laurence Costes, Claudine Dardy, Sylvette Denèfle, Michèle Dion, Francis Farrugia, Daniel Filâtre, Suzie Guth, Yvon Lamy, Jean-Luc Primon, Jean-Yves Trépos, Marie-Caroline Vanbremeersch.

Excusés : François Cardi, Monique Hirschhorn, Monique Legrand, Maryse Tripier

Invitée : Catherine Déchamp-Le Roux

1) Renouvellement des membres du bureau. Ph.Cibois, président depuis trois ans ne souhaite pas un renouvellement de sa charge et propose à Daniel Filâtre d'être candidat à sa succession. Daniel Filâtre est élu à bulletin secret à l'unanimité. Ph.Cibois est élu secrétaire général, chargé du bulletin, M. Dion est confirmée dans son rôle de trésorière. Il est convenu que d'autres membres seront élus au bureau en fonction de tâches spécifiques.

2) Préparation des réunion à venir. Un tour de table permet de préciser le rôle des réunions de l'ASES : elle doivent contribuer aux débats de notre milieu professionnel. Les contributions trouvent leur place ensuite dans la Lettre de l'ASES, ce qui permet de toucher ceux qui ne peuvent pas venir aux rencontres et ainsi de susciter le débat.

La prochaine rencontre de rentrée aura lieu le samedi 2 octobre 1999 à l'amphi Durkheim et portera sur le thème de la comparaison européenne (resp. : Catherine Déchamp-Le Roux et Suzie Guth). On traitera des cursus, des évolutions récentes et des enjeux actuels et de la professionnalisation du sociologue.

C'est une première rencontre qui ne cherchera pas à présenter un panorama européen exhaustif, il s'agit dans un premier temps de faire présenter par des francophones la situation dans trois pays voisins. Le but est que ces expériences nous aident à réfléchir à nos propres problèmes.

Pour la rencontre de Janvier 2000, elle portera sur les Ecoles doctorales et le problèmes qui leur sont liées. Responsables Philippe Cibois et Sylvette Denèfle (avec demande de participation extérieure).

Autres rencontres mises en chantier :

- La préparation aux concours de recrutement du secondaire, la filière SES, la formation continue : responsable Yvon Lamy (avec demande de participation extérieure)

- Le rôle du livre en sociologie : responsables Régine Bercot et Michèle Dion

- Enseignant-chercheur ou enseignant-administrateur : responsables Yéza Boulhabel-Villac et Jean-Yves Trépos

- une rencontre commune ASES/AISLF est programmée à Toulouse en novembre ou décembre 1999 sur le thème "quelles compétences transmettons nous aux étudiants dans le cadre des DESS, IUP, Magistère", resp. M. Legrand, A. Huet, D. Filâtre.

3) L'annuaire. Suzie Guth fait le point de la situation et soumet plusieurs projets de couverture. L'annuaire devrait être disponible à la rentrée.

 

***

INFORMATIONS

Rectificatif : Suite à la publication de la liste des DESS dans le dernier numéro de la Lettre, Jean-Pierre Durand signale que le DESS "Images et société" de l'Université d'Evry n'est pas dirigé par J. Sebag et J.-P. Durand mais par J. Sebag et M. Kherroubi.

RÉCAPITULATIF DES RENCONTRES PUBLIQUES DE L'ASES

Mars 99 Innovations pédagogiques

Janvier 99 Les sociologues publient : où, comment ?

Sept. 98 Quelle politique de la recherche pour l'Université ?

Mars 98 Quarante ans d'enseignements de la sociologie, bilans et perspectives

Janvier 98 Les DESS de sociologie

Sept. 97 Chargés de cours, Ater, moniteurs, doctorants,... Quelle politique pour les statuts précaires ?

Mars 97 Actualité de la réforme du Deug (Bayrou)

Théorie sociologique et sociologie générale

Janvier 97 Enseigner les méthodes : observation, questionnaire, entretien

Sept. 96 Réforme du Deug ? Comment la prendre en charge.

Mars 96 Les débouchés des DEA et des docteurs (selon des sociologues non-universitaires)

Janvier 96 Campagne de recrutement 96 : nouvelles règles du jeu, nouveaux enjeux.

Sept. 95 Le bilan de la campagne d'habilitation des DEA : critères d'évaluation et processus de décision. Débouchés des DEA, avenir des docteurs en sociologie.

? Sociologie hors les murs (Lettre de nov 95)

mars 94 L'afflux, l'accueil et le devenir des étudiants de premier cycle en sociologie

octobre 93 L'habilitation à diriger des recherches : quelles exigences ?

février 92 la préparation à la recherche en sociologie et démographie (discussion du rapport Chapoulie/Dubar)

octobre 90 enseignement-recherche

mai 90 DESS

déc. 89 Journée sur les DEA

LETTRE DE L’ASES :

au sommaire des précédents numéros

Lettre n°26 : mars 1999

Les sociologues publient : où comment ?

Recrutements de 1998. Informations sur le CNU par Alain Chenu. Tribunes libre par Alain Quemin et Antonio Monaco

Dossier DESS. Compte-rendu de deux réunion de l'ASES par Monique Legrand. Liste des DESS de sociologie. Quelques thèses contestables par Pierre Tripier. Une question stratégique par Alain Chenu.

Chronique Internet, Vie de l'ASES

Lettre n°25 : septembre 1998

La fondation de la sociologie française. La seconde institution de la sociologie par Francis Farrugia. L'organisation sociale de la sociologie depuis 1945 par Alain Chenu. "Souvenirs d'un vieux mandarin" par Henri Mendras

Recrutements de 1998. Informations sur le CNU par Alain Chenu. Tribune libre par Georges Ubbiali

Dossiers SES. Formation par la recherche par Gérard Boudesseul. De la sociologie aux SES par Nicole Pinet

Pédagogie. Mais que font-ils donc pendant les cours ? par Yankel Fijalkow et Charles Soulié

Vie de l'ASES.

Lettre n°24 : janvier 1998

Quelle politique pour les statuts précaires. Pour un code de bonne conduite. Comptes-rendus de la rencontre du 27 septembre 1997.

Recrutements de 1997. Les nominations d'enseignats-chercheurs en sociologie-démographie 1997 par Alain Chenu.

Vie de l'ASES. Informations

Lettre n°23 : mai 1997

A propos de la réforme du Deug. L'usine à gaz de M. Bayrou par Philippe Cibois, Analyse des nouveaux arrêtes, rencontre avec le directeur scientifique SHS, table ronde de l'ASES.

Travaux de l'ASES sur l'enseignement : des méthodes (l'observation et ses protocoles d'analyse, le questionnaire et son traitement, l'entretien et l'analyse de son contenu) ; de la théorie.

Tribunes libres : de Frédérik Mispelblom et Serge Dufoulon.

 

Lettre n°22 : décembre 1996

Recrutement : bilan et questions. Position de l'ASES, les nouveaux recrutés

L'évaluation du secteur Sciences humaines et sociales par Catherine Rollet

Tribune libre : Bruno Péquignot, collectif (recrutement), Nicole Pinet, Jean Copans.

Lettre n°21 : septembre 1996

Réforme du Deug ? Comment la prendre en charge ?

Frederik Mispelblom : Enseigner dans le DEUG : le savant est aussi un politique.

Philippe Cibois : Pour un Deug généraliste

Daniel Filâtre : Après trois ans d’expérience du Deug rénové, faut-il une autre réforme ?

Lettre n°20 : juillet 1996

Alain Chenu : CNU 1996, un bilan

Philip Milburn : chronique d’une grève annoncée

Philippe Cibois : morale provisoire pour l’Université

 

 

 

 

 

***

 

 

 

 

Si vous souhaitez adhérer à l’ASES

Remplissez le bulletin ci-dessous et retournez-le à :

Michèle DION (ASES)

46 bd Richard-Lenoir

75011 PARIS

La cotisation annuelle de 150 F (chèque à l’ordre de l’ASES)

inclut le service de La Lettre de l’ASES

Si vous êtes déjà membre de l'ASES, vous recevrez à l'occasion de la préparation de l'Assemblée Générale annuelle une invitation à renouveler votre adhésion pour 2000

 

 

 

 

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

 

Association des Sociologues Enseignants du Supérieur

 

Adhésion pour l’année 2000

 

NOM Prénom

Fonctions professionnelles

Etablissement

Adresse pour l’envoi du bulletin

Signature

Pour recevoir un reçu fiscal, veuillez cocher cette case o