La Lettre de l’ASES

Association des Sociologues Enseignants du Supérieur

21

septembre

1996

 

numéro spécial :

Les textes de la rencontre

 

Réforme du Deug ?

Comment la prendre en charge.

Enseigner dans le Deug : le savant est aussi un politique

Frédérik Mispelblom (Université d’Evry) 3

Pour un Deug généraliste

Philippe Cibois (Université d’Amiens) 9

Après trois ans d’expérience du Deug rénové, faut-il une autre réforme ?

Daniel Filâtre (Université de Toulouse le Mirail) 15

 

 

 

Samedi 28 septembre 1996

de 9h30 à 13h

Amphi Durkheim de la Sorbonne

La lettre de l’ASES est le bulletin de liaison de l’ASES

Association des Sociologues Enseignants du Supérieur

Cette association Loi 1901 a été fondée en 1989 pour "défendre, améliorer et promouvoir l’enseignement de la sociologie. Elle vise à rassembler, à des fins d’information, de réflexion, de concertation et de proposition, les enseignants-chercheurs et les enseignants de sociologie en poste dans les universités et les établissements d’enseignement supérieur assimilés"

Le Conseil d’administration en est actuellement le suivant :

Yeza Boulhabel-Villac

Marcel Calvez

François Cardi (membre du bureau, secrétaire général)

Alain Chenu (membre du bureau, affaires corporatives)

Philippe Cibois (président, chargé du bulletin)

Catherine Déchamp-Le Roux

Michèle Dion (membre du bureau, trésorière)

Jean-Pierre Durand

Daniel Filâtre

Yves Grafmeyer

Suzie Guth

Monique Hirschhorn

Armel Huet

Dominique Jacques-Jouvenot

Monique Legrand

Claude Leneveu

Bruno Péquignot (membre du bureau, relations publiques)

Olivier Schwartz

François de Singly (vice-président)

Jean-Yves Trépos (membre du bureau, pédagogie)

Maryse Tripier (membre du bureau, recherche)

Enseigner dans le DEUG :

le savant est aussi un politique.

Frederik Mispelblom

Responsable de la filière de sociologie, université d'Evry

 

La réforme du DEUG nous pose une question de fond : en quoi nos théories du système scolaire nous permettent-elles de faire une analyse pertinente des changements de la situation de l'enseignement de la sociologie à l'université et d'y esquisser une stratégie en connaissance de cause ? En quoi nous-mêmes, en tant que sociologues-enseignants, sommes-nous aussi les "politiques" de nos pédagogies, responsables à notre manière de l'avenir de notre public étudiant ?

A côté du thème mobilisateur des "moyens" (postes, locaux, finances) traditionnellement au coeur des revendications universitaires, ces questions théoriques et pédagogiques ont aussi été abordées par une partie des étudiants en novembre-décembre 1995. Les poser correctement et y répondre me semble une composante indispensable des discussions sur la réforme du DEUG.

Qu'est-ce qui a changé ?

La démocratisation progressive de l'accès à l'université y amène de plus en plus de "non-héritiers". S'il ne faut pas oublier que ces étudiants aussi sont le produit d'une longue sélection qui a vu l'élimination de bon nombre de leurs camarades par rapport auxquels ils sont des "rescapés", cela n'empêche que le pourcentage d'enfants originaires du "haut" des classes populaires constitue parfois près du tiers des effectifs, notamment dans certaines universités "nouvelles".

Sans pour autant remettre fondamentalement en cause les théories de la reproduction (puisque les diplômes universitaires se dévalorisent et que des pôles d'élite se reconstituent ailleurs) le fait est que nous avons un nombre croissant d'étudiants qui n'ont pas reçu, ni de leurs parents ni de leurs études secondaires, les modes d'emploi de l'enseignement universitaire que nous continuons pourtant souvent à leur supposer. Mais il ne faudrait pas en conclure qu'ils sont seulement "démunis" car ils ont de fait d'autres modes d'emploi de l'université et vivent dans un autre univers de référence que les étudiants traditionnels ou que nous-mêmes. Comme le note Philippe Cibois dans la précédente Lettre, ces mêmes étudiants sont capables de s'organiser pour faire valoir leurs revendications. Ils ne sont pas sans motivations, même s'ils n'ont pas toujours celles que nous souhaiterions qu'ils aient. Venir à l'université pour obtenir un DEUG ou une licence afin de passer des concours administratifs, s'inscrire dans un IUFM ou une école de formation au travail social, ou aspirer à travailler dans un service de ressources humaines d'une entreprise, sont des motivations légitimes. Il est dommage pour nous qu'il y ait peu d'étudiants au départ motivés pour des études de sociologie, mais sommes-nous si sûrs que cette motivation prédominait il y a 15 ans ou qu'elle fut toujours prédominante chez nous-mêmes, quand nous étions en première année de faculté ?

Somme toute, cette situation ressemble, mutatis mutandis, à celle que connurent les fondateurs de la sociologie, qui s'adressaient comme Durkheim à des instituteurs et autres professions, à qui il s'agissait de faire comprendre l'intérêt de la nouvelle science sociologique à la recherche de son public. N'est-ce pas là aussi notre propre défi : susciter le "désir de sociologie" en référence aux préoccupations singulières des étudiants en chair et en os à qui nous avons effectivement affaire ? Ne convient-il pas de faire l'hypothèse que si les étudiants s'intéressent souvent peu à ce qui nous intéresse, c'est probablement parce qu'on ne réussit pas à le rendre vraiment intéressant ? Et que le moyen d'y parvenir serait de commencer par s'intéresser un peu à ce qui les intéresse eux, non pour s'y limiter mais pour s'y appuyer et les amener ailleurs ?

Loin de représenter seulement une nouvelle contrainte ou un nouvel obstacle épistémologique, il me semble que la situation actuelle peut au contraire nous faire avancer dans l'approfondissement de notre discipline et nous faire conquérir de nouveaux auditoires. Par rapport à un passé que nous avons peut-être tendance à idéaliser, où on croit avoir eu de "vrais étudiants", un certain nombre de sous-entendus et de clins d'oeil ne marchent plus et cela peut nous obliger à revoir non seulement nos manières de présenter les théories sociologiques, mais même à réexaminer celles-ci.

Du côté des étudiants.

Les études statistiques que nous menons sur la composition de la population étudiante en 1ère année doivent être complétées par des approches plus qualitatives : centres d'intérêt, lectures, préoccupations, aspirations. Des unes et des autres sort un panorama contrasté, car tout comme il n'y a pas "le" mouvement étudiant, la population étudiante est hétérogène, aux aspirations contradictoires voire conflictuelles. Je ne veux y relever que quelques traits troublants qui peuvent nous amener à nous interroger sur ce que nous racontons dans nos cours et nos TD car ils signifient que certains de ceux qui n'étaient jusque-là le plus souvent que les "objets" de l'analyse sociologique, se trouvent maintenant dans les salles de cours : parents au chômage, frères et soeurs sans diplômes, au chômage, dans des "petits boulots" ou à l'usine, familles qui sont l'objet d'une mesure judiciaire ou d'assistance éducative voire ont un enfant en prison. Non seulement nous avons des étudiants qui lisent peu et regardent plutôt la télé (et pas forcément la 5 ), mais il y en a qui, du point de vue de certaines analyses sociologiques, devraient être désignés comme exclus, inadaptés, en échec, manquant de culture, vivant des situations anomiques.

Cela a au moins trois conséquences sur l'écoute qu'ils font de nos cours. Tout d'abord des clés leur manquent : organiser soi-même son travail, utiliser la bibliothèque universitaire, faire des fiches de lecture, prendre des notes donc faire le tri entre ce qui est essentiel et ce qui l'est moins et synthétiser un discours, rédiger une dissertation, tout cela n'a rien de naturel, n'a pas forcément été acquis au lycée et doit de toute manière s'adapter à la nouvelle situation universitaire. Des TP de méthodes et du tutorat (ces derniers peuvent être animés par des étudiants de licence ou de maîtrise) peuvent y suppléer à une condition pédagogique fondamentale : ne pas prendre un tel travail pour de "l'assistance aux démunis" mais comme une des activités préparant au métier de sociologue, que tout sociologue a dû apprendre à un moment ou un autre. Si nous acceptions un peu plus nous-mêmes de raconter et nos débuts et nos "ficelles" (comment mène-t-on et décrypte-t-on des entretiens, comment lit-on un livre ?) donc de démystifier la position du "savant" pour en analyser les conditions d'exercice réelles, cela diminuerait la tendance de certains étudiants à se considérer comme "nuls" .

Cette tendance, socialement construite dès les débuts de la scolarité, est basée sur l'idée que ces étudiants ne peuvent être caractérisés que par ce qui leur manque (une certaine culture scolaire), et n'apportent eux-mêmes aucune positivité autre. Nous risquons de l'entretenir même à notre corps défendant, par nos attitudes pédagogiques et par celles des théories du système scolaire qui reprennent de manière a-critique l'idée d'échec scolaire, expliquent ce dernier par l'absence de culture dans les familles, ou prônent la thèse de la reproduction d'une manière un peu trop mécanique. Il devient plus difficile de tenir de tels discours quand on a dans l'auditoire les "exceptions statistiques" qui se considèrent eux-mêmes comme la preuve vivante de l'insuffisance de telles explications. Le défi de tels "cas" est de tenter d'en élaborer une analyse combinant les divers systèmes d'explication disponibles, à la fois en termes statistiques, d'opposition de cultures et de trajectoires sociales singulières. N'est-ce pas logique qu'une partie des étudiants ne commence vraiment à s'intéresser à l'enseignement sociologique qu'à partir du moment où ils y trouvent des clés pour expliquer positivement leur propre existence ?

Ensuite, des différences énormes existent dans les univers de référence entre enseignants et étudiants. Des pans entiers de notre vocabulaire même non spécialisé, qui intervient nécessairement dans nos cours, maints exemples que nous utilisons pour illustrer les thèses sociologiques, tombent souvent à plat car ceux à qui on s'adresse ne les connaissent pas. Une partie des étudiants a ainsi deux difficultés par rapport à l'enseignement de la sociologie : à la première qui est celle de tous les étudiants, apprendre des concepts spécifiques, un vocabulaire spécialisé et des définitions, s'ajoute une seconde qui est de se familiariser avec un univers de références qui n'est pas le leur destiné à "faire comprendre" les concepts. N'est-ce pas inévitable dans ces conditions qu'ils pensent que finalement, "la sociologie, ce n'est pas pour nous" ?

Cette situation non plus n'a rien de fatal, si on prenait la peine d'une part de définir même les mots en apparence les plus ordinaires avec lesquels on fait cours, et d'autre part de s'intéresser un peu à l'univers de référence qui est celui d'une partie des étudiants. On peut parfaitement illustrer certains cours sur la famille et l'éducation à partir de l'émission Hélène et les garçons, sur la sociologie du système scolaire en invitant les étudiants à raconter leurs propres expériences scolaires passées si on laisse entendre qu'il est permis de critiquer le corps enseignant, ou en prenant la situation même du cours et le rapport enseignant-enseignés hic et nunc comme exemple. Les théories de l'individu, de l'acteur ou du sujet, pourraient être illustrées dans l'année qui vient à partir de l'exemple des "sans-papiers" !

Troisième décalage enfin, lié à l'état du marché du travail : il existe chez bon nombre d'étudiants une forte demande "d'adaptation" aux exigences des employeurs, qui se traduit par le désir de recevoir des enseignements "utiles" et rejoint le thème de la professionnalisation de l'université. Cette demande va à l'encontre aussi bien de certaines de nos (anciennes ?) tendances contestataires que de l'idée de la "science pure et désintéressée". Mais il n'est pas sans importance qu'elle émane d'étudiants qui vivent souvent des situations familiales très dures marquées par le chômage ou sa menace, mus par le désir "d'en sortir", ce qui ne veut pas dire pour autant que leur volonté de se conformer aux exigences des employeurs implique une adhésion aux politiques de ceux-ci.

Ce décalage est peut être pour nous celui qui est politiquement le plus délicat, car certaines des réponses qu'on peut y apporter risquent d'aller dans le sens de la transformation du DEUG en "super bac" ou de rejoindre la tendance actuelle de l'instrumentalisation des sciences sociales par les entreprises. Il est pourtant parfaitement possible de le traiter autrement, en montrant d'une part aux étudiants ce qu'ils demandent vraiment, donc comment leur demande est socialement construite, d'autre part que la seule "utilité" spécifique que la sociologie peut apporter aux employeurs, c'est son regard déspécialisé et critique sur les choses de l'entreprise, qui permet d'y élaborer des perspectives innovantes.

Dans ces conditions, on peut s’accommoder des étudiants qui s'inscrivent en sociologie pour devenir instituteur ou travailleur social, et même admettre directement en 2ème année des étudiants ayant obtenu des BTS ou des DUT dans des domaines liés à ceux enseignés à l'université (à l'université d'Evry, sociologie du travail et de l'entreprise). L'enseignement sociologique leur parlera autrement d'un secteur dans lequel ils ont fait des stages ou à propos duquel ils ont eu d'autres enseignements, ou vers lequel ils veulent se diriger. Leurs difficultés de conceptualisation peuvent être en partie compensées par leur expérience ou leur désir de connaître, non la sociologie, mais l'un des domaines qu'elle analyse. Il n'est pas du tout exceptionnel dans ces conditions que certains étudiants soient "détournés" de leur chemin initial pour finir par faire non seulement un DESS, mais un DEA puis une thèse. Qu'en même temps d'autres deviennent instituteur, travailleur social ou cadre dans un service de ressources humaines avec des approches sociologiques, on ne peut que s'en réjouir : cela renforce, dans ces secteurs, notre audience potentielle.

Du côté des enseignants.

En tant qu'enseignants de sociologie nous avons au moins deux sortes de théories : celles que nous enseignons, et celles que nous pratiquons de fait en enseignant. Les deux peuvent être contradictoires et le sont souvent. On peut enseigner des théories qui se veulent une critique de la société dans laquelle on vit, avec une manière de faire cours, un esprit élitiste, des façons de noter des plus conservatrices. L'inverse existe aussi. De même peut-on d'un côté insister en début d'année sur l'importance cruciale qu'a le premier cycle, alors que par ailleurs aucun professeur de rang A n'y souligne, par son enseignement, cette importance. Les exemples de tels décalages sont assez répandus.

Ici plus qu'ailleurs une "sociologie de la sociologie" s'impose. Elle devrait reposer sur l'idée que la "vérité" d'un concept sociologique enseigné ne réside pas dans la seule conformité des dires de l'enseignant aux définitions consignées dans les livres, mais dans le rapport entre cette parole prononcée à un moment précis dans une conjoncture précise, et la situation de l'auditoire. Partant de cette idée même l'enseignement à propos de nos ancêtres totémiques peut passionner les étudiants actuels.

En effet, tous les fondateurs de la sociologie ont été des inventeurs, obligés de se faire une place dans un espace théorique déjà occupé, croisant le fer avec des adversaires théoriques et politiques bien réels, et s'appuyant sur les théories qu'ils étaient en train d'esquisser pour construire une stratégie en la matière. Dans ce sens, ce furent tous des savants qui étaient aussi des "hommes d'action". C'est très explicitement le cas de Durkheim, comme en témoigne son engagement pour la création d'une nouvelle morale laïque dans l'école républicaine, cela est moins apparent pour Weber et pourtant : il assigne au savant la tâche "d'obliger l'individu à se rendre compte du sens ultime de ses propres actes" en lui montrant "qu'en adoptant telle position vous servirez tel dieu et vous offenserez tel autre". Dans ses textes, comme celui sur le métier et la vocation d'homme politique, Weber ne mâche pas ses mots : définir l'Etat par le "monopole de la violence légitime" et l'ordre par le "maintien du rapport de forces existant", noter que les parlementaires "en expédiant leur courrier personnel de leurs pupitres font semblant de s'occuper des affaires du pays" ne manque pas de sel aujourd'hui !

Mais voilà : comment présentons-nous ces auteurs, quelle sélection de leurs textes effectuons-nous ? Il existe bien des façons dont une qui consiste à les aseptiser pour n'en faire que de "grands savants" sans aucun engagement, ayant triomphé par les seules vertus de leur Science, propre à décourager les plus motivés des étudiants. A l'inverse, on peut trouver chez tous ces auteurs des textes qui les interpellent et permettant d'éclairer le monde dans lequel ils vivent aujourd'hui.

L'enseignement dans le DEUG est probablement dans toute la filière celui qui est le plus difficile et peut sembler le plus ingrat. L'une des causes en est à mon avis le fait qu'on ne prend que rarement la peine d'en faire un objet d'études sociologiques sérieuses. Si on le faisait, l'organisation même du DEUG, la coopération avec les autres disciplines, et chaque cours et TD, pourraient se transformer en vaste champ d'expérimentation de nos thèses.

La condition sine qua non, c'est de revoir un certain rapport entre théorie et stratégie, science et politique (en l'occurrence pédagogique), tel qu'il s'est historiquement construit depuis que notre discipline est sortie de son état pionnier.

Pour un Deug généraliste

Ph.Cibois

Université d’Amiens

Le Deug : une situation de crise

Les symptômes sont nombreux et sont ressentis par de nombreux collègues de diverses façons : au niveau le plus proche du café du commerce, c’est la constatation que les étudiants actuels ne répondent plus aux exigences intellectuelles propres aux sciences humaines, "le niveau baisse". Par contre, si l’on essaye d’élaborer davantage le diagnostic, on peut, (en s’inspirant d’un texte récent du Deug de Paris V), remarquer que les étudiants ont beaucoup de mal à s’insérer à l’université pour plusieurs raisons :

- ils sont orientés de façon directive après des études secondaires trop moyennes pour leur permettre un accès aux filières sélectives : nous avons devant nous des étudiants qui ont plus ou moins perdu confiance en eux du fait d’échecs dans le secondaire.

- comme ils l’ont fait pendant des années dans le secondaire, ils assimilent passivement les savoirs, plus habitués à "absorber et restituer" qu’à "acquérir et organiser" : de ce fait on se retrouve aux examens avec ces copies où l’étudiant nous déverse en vrac tout ce qu’il sait sur un sujet, en laissant à l’examinateur le soin de savoir pourquoi tout cela est là.

- ils ont des représentations fausses de la sociologie qu’ils identifient à une science "des problèmes de la société". Plus précisément ils veulent trouver des réponses aux problèmes actuels d’insertion : insertion des jeunes (à l’école, dans les banlieues, dans le monde professionnel), des handicapés, des chômeurs, etc.

- la nécessité de payer leurs études fait que beaucoup ne peuvent plus consacrer un temps suffisant au travail universitaire ; de plus certains investissent davantage dans une prise d’autonomie vis à vis de leur famille par le biais de "petits boulots" que dans leurs études.

Cette situation des étudiants provoque un cercle vicieux dont les termes sont les suivants :

1) beaucoup d’étudiants ont des motivations professionnelles dans le domaine de l’insertion : ils veulent devenir professeur des écoles par le biais des IUFM, ou passer des concours administratifs dans des métiers d’insertion (éducateur, assistante sociale,...)

2) arrivant avec en tête ces problèmes d’insertion, ils sont déçus par les enseignements de sociologie qui leur sont proposés, soit parce que trop théoriques, soit parce que complètement en dehors de ce qui les intéresse (comme les mathématiques ou l’anglais).

3) embarqués dans une filière qui les déçoit intellectuellement, ils mettent une croix sur leurs attentes et retrouvent les réflexes du secondaire : ce n’est plus "passe ton bac d’abord", mais "obtient ta licence" et ils assurent tout au plus un service minimum intellectuel. Leur objectif est devenu de réussir aux examens avec l’investissement minimum.

Sortir de la crise

Pour briser ce cercle, deux manières de faire peuvent être envisagées, soit réformer l’offre, soit en proposer une nouvelle.

1) adapter l’enseignement de la sociologie

J’ai jusqu’à présent été partisan de cette solution où l’on dit qu’il faut prendre acte de la population qui nous arrive et au moins transformer le Deug pour tenir compte du public, par exemple partir de son intérêt pour les questions sociales pour les initier à une approche théorique des problèmes ; ne pas commencer par un enseignement des pères fondateurs de la discipline mais par la sociologie actuelle, etc.

Je sais bien que des expériences intéressantes dans ce sens ont été faites par les plus entreprenants d’entre nous mais c’est une raison supplémentaire pour douter de la possibilité de sa généralisation. Il est normal qu’en tant qu’association nous fassions la promotion de ce qui se fait de mieux dans notre discipline mais en même temps nous devons avec réalisme prendre acte des faibles possibilités de modifications des situations actuelles là où n’existe pas toute une équipe ayant la capacité de gérer des évolutions, ce qui est quand même le cas le plus fréquent, en particulier dans les universités numériquement les plus importantes où les modifications sont les plus difficiles du fait du nombre.

Nous devons enfin tenir compte du fait que si l’étudiant arrive en socio avec des motivations "sociales", celles-ci cependant peuvent ne pas être très fortes, être du registre de la curiosité plus qu’autre chose, ce qui est d’ailleurs normal vis-à-vis d’une discipline inconnue pour certains.

2) proposer un nouveau Deug

De ce fait, je crois raisonnable de proposer, en plus des Deug actuels et parallèlement à eux, un nouveau Deug généraliste dont les caractéristiques seraient les suivantes :

- sa pédagogie est inversée par rapport à la pédagogie des disciplines actuelles en ce sens que l’on ne cherche pas à y acquérir un savoir disciplinaire en apprenant en même temps une méthode intellectuelle, mais que le but en est d’y acquérir une méthode intellectuelle en travaillant un centre d’intérêt.

- sa finalité est généraliste et non professionnelle dans ce qui est étudié mais, et c’est ce qui peut le sauver dans le contexte actuel, il peut accueillir tous ceux qui se destinent aux IUFM ou à des destinations analogues.

- y trouveraient mieux leur place que dans les filières disciplinaires de socio (ou de psycho), tous ceux qui ont un intérêt pour les problèmes de société plus que pour une étude scientifique de la société, ce qui n’est pas la même motivation.

Contenu pédagogique

Il s’agit de proposer aux nouveaux étudiants des outils pour mieux comprendre le monde contemporain : à cette fin on proposerait de prendre le nombre requis de modules entièrement "à la carte", même s’il doit en résulter un parcours peu cohérent.

En effet le but n’est pas de donner une formation à une discipline mais de donner l’occasion de découvrir des enseignements qui accrochent l’étudiant parce qu’ils correspondent à ses attentes. Il ne s’agit plus d’enseigner une discipline mais de motiver à partir d’un centre d’intérêt, vieille recette des pédagogies actives car il faut impérativement casser l’association faite dans le secondaire entre apprentissage et sanction scolaire. Il s’agit maintenant de prendre gout à une discipline pour elle-même.

A titre d’exemple on pourrait envisager des modules sur le cinéma contemporain, sur l’histoire et la sociologie des religions, sur la psychologie de l’adolescent, sur la vie politique contemporaine, sur l’urbanisme des banlieues, sur les réseaux informatiques ; tous les champs sont possibles à condition que ce que l’on y fait aide à la compréhension du monde contemporain et ne soit pas simplement l’expression d’une sous-culture (mais de toute façon la nécessité de prendre plusieurs modules force à la non-spécialisation).

Après ce Deug généraliste de Compréhension du monde contemporain, l’étudiant pourrait envisager plusieurs options :

- s’il envisage toujours de faire les IUFM, d’entrer en licence de Sciences de l’Education,

- s’il ne veut plus faire les IUFM et fait le choix d’une discipline spécifique, de faire une troisième année de Deug pour compléter les éléments manquants et ensuite entrer en licence de la discipline en question (avec un double Deug : généraliste + discipline particulière)

Organisation

Il ne fait aucun doute qu’un Deug généraliste serait perçu comme étant d’un autre niveau, plus faible évidemment, que les Deug des autres disciplines : ce n’est le cas que si l’on se place du point de vue d’une discipline pour lequel la norme est l’apprentissage d’une part substantielle de notions et de méthodes. Par contre en termes d’exigence intellectuelle, il n’est pas dit que de partir des intérêts concrets sur un sujet brulant conduise à moins de réflexion et d’activité intellectuelle que le fait d’apprendre par coeur une tranche de cours qui sera oubliée assez vite. On peut même penser qu’à terme, le fait que le choix d’une discipline ne se fera que par des gens motivés ne peut que faire monter le niveau de cette discipline, même si son public diminuera (et pour cette raison).

Du point de vue des formateurs d’IUFM et dans la mesure où ils acceptent toute licence pour y être candidat, cela signifie bien que c’est la formation générale qui est souhaitée et non telle ou telle spécialité. Un Deug généraliste qui produirait des étudiants ayant une démarche intellectuelle plus autonome ne peut que les satisfaire.

Les sciences de l’éducation qui verraient passer la majorité des candidats aux IUFM pourraient avoir des positions négatives vis-à-vis de ce Deug : si la perturbation était jugée trop grande, rien ne leur interdirait de créer une filière de leur licence, spécifique aux candidats aux IUFM (ce qui serait un juste retour des choses de leur absence en Deug, y compris dans les modules de préprofessionnalisation destinés aux carrières de l’enseignement, modules qui devraient bien évidemment continuer à exister dans le Deug généraliste).

Des expériences analogues

1) En terme politiques, il faut réfléchir sur l’expérience des Deug Culture et communication, sur leur réussite et sur leur échec. Ils ont échoué en ce sens qu’ils ont été l’objet de vives oppositions du fait de leur "absence de débouchés professionnels" ce qui a entrainé dans de nombreux cas leurs suppression ou leur modification. Mais d’un autre côté, si on s’est attaqué à eux c’est parce qu’ils étaient recherchés par de nombreux étudiants ce qui signifie précisément que des thèmes bien axés sur le monde contemporain intéressent vivement les étudiants.

2) Il faut aussi réfléchir sur une expérience très intéressante et qui par beaucoup d’aspects est proche de ce qui est proposé ici : il s’agit du Deug Intervention sociale et éducative expérimenté depuis deux ans à Lille 1 et qui propose explicitement aux étudiants de première année de réfléchir sur des problèmes d’insertion vus au travers de diverses disciplines : sociologie, psychologie, histoire, sciences éco. Ce n’est qu’en deuxième année qu’un choix disciplinaire est fait : pour la socio, un accord est passé avec Lille 3 pour l’accueil des sociologues en licence.

Au bout de deux ans, il est possible de tirer plusieurs leçons de cette expérience :

- tout d’abord, ce genre de proposition correspond à un désir des étudiants qui sont très attirés par elle : 450 en première année la première fois, 700 la deuxième.

- pour ceux qui suivent cette filière et qui veulent travailleur dans les métiers du social, ils peuvent en 2e cyle suivre une MST à l’intérieur de l’UFR "développement social" qui est responsable du Deug et qui continue sa filière par un DESS,

- enfin il semble, mais les premiers sortants du Deug arrivent cette année en licence, que ceux qui en deuxième année ont choisi la sociologie en connaissance de cause, soient bien motivés et accrochés : de ce point de vue l’expérience est à suivre attentivement.

3) D’une manière générale, on remarquera que souvent les modules optionnels de nos Deug ont de meilleurs résultats que les modules obligatoires : il y a peut-être à prendre en compte le fait que les enseignants peuvent assurer le succès de leur enseignement par de moindres exigences mais l’on constate bien souvent qu’en fait les étudiants fournissent plus de travail parce que plus motivés.

Effectifs

Depuis 1993 les effectifs de première année d’IUFM pour l’enseignement dans le primaire est stabilisé à un effectif annuel de 15.000 dont environ 40% ont obtenu une licence de sciences humaines et sociales ce qui représente 6000 étudiants. (Note d’Information 96-07). En supposant entre deux et trois candidats au départ pour un entrant en IUFM cela fait une population annuelle potentielle d’environ 10.000 à 20.000 étudiants tout à fait suffisante pour envisager une filière spécifique. Ceci sans compter tous ceux qui se préparent à des carrières autres.

En terme d’enseignants, il est évident qu’une partie des enseignants qui font les Deug actuels devront venir enseigner dans les Deug généralistes. Ils y viendront en se disant qu’ils n’ont plus à "défendre un niveau" mais qu’ils ont à être convainquant pour montrer que leur discipline peut aider à comprendre le monde contemporain. D’un public captif, on passe à un public volontaire : c’est une libération mais aussi l’exigence de devenir intéressant si l’on veut le développement de la discipline.

Professionnalisation

Il me semble normal de prendre en compte la pression sociale en faveur de la professionnalisation, même si nous savons que jouent autant que le diplôme lui-même :

- les compétences personnelles et professionnelles déjà acquises par l’étudiant au cours de ses études (stages, vie associative,...),

- le niveau de motivation et la personnalité elle-même de l’étudiant, en particulier ses capacités à prendre des responsabilités.

Nous devons prendre en compte le souci de professionnalisation en développant les modules actuels de préprofessionnalisation dans d’autres domaines que ceux de l’enseignement : il serait souhaitable que l’étudiant prenne conscience des métiers qui de fait sont ceux des étudiants qui l’ont précédé il y a quelques années. Cela suppose évidemment un développement des Observatoires des études et de l’insertion professionnelle des étudiants. Nous devons également aider l’étudiant à faire murir son projet par un tutorat qui ne soit pas simplement tourné vers les difficultés intellectuelles mais qui aide à la constitution d’un projet de formation et d’un projet professionnel.

Conclusion

La raisons profonde du changement désiré, c’est que l’enseignement de masse d’aujourd’hui nécessite des changements de structure : nous devons proposer aux jeunes qui sortent du lycée et qui ont été exclus des filières nobles, des apprentissages qui ne soient pas sources d’élimination mais qui soient des initiations positives. Leurs expériences antérieures du secondaire nécessitent, pour certains, qu’ils reprennent confiance dans leurs possibilités intellectuelles par le biais de découvertes intéressantes choisies volontairement (mais aidées par un tutorat effectif).

D’une manière pratique et comme tout ce que je viens de dire vaut aussi bien pour la psychologie que pour les autres disciplines de lettres, des propositions d’expérimentations pourraient être envisagées à un échelon local si des associations professionnelles d’autres disciplines s’associaient à nous.

Après trois ans d’expérience du DEUG rénové,

faut-il encore une autre réforme?

Daniel Filâtre

Université de Toulouse le Mirail

 

Cette contribution est d’abord un témoignage et ensuite une réflexion, un point de vue personnel qui porte sur une histoire collective, la réforme pédagogique que nous avons menée depuis quatre ans à l’Institut des sciences sociales " Raymond Ledrut " de l’université de Toulouse le Mirail.

Cette université me semble correspondre au modèle actuel de l’université française frappée par le défi de la massification de l’enseignement supérieur. Le terme n’est certes pas joli, presque péjoratif; et pourtant dans les faits, l’université accueille de plus en plus d’étudiants, de plus en plus différents, pour des missions de plus en plus complexes. A Toulouse le Mirail, la structure des effectifs est significative. Les étudiants de premier cycle représente plus de la moitié des effectifs, soit près de 14000 alors que le troisième cycle n’en compte que 1740 soit moins de 7%. En sociologie, nos effectifs pour l’année 95-96 s’organisent de la même manière, 1024 étudiants en 1er cycle, 562 en second cycle et 191 en troisième cycle, pour un flux d’entrée 342 étudiants en augmentation constante de 12% en moyenne depuis 1990.

La réforme du DEUG décrite dans l’arrêté de mai 92 a été appliquée dans notre université dès la rentrée d’octobre 93. Ici comme ailleurs, elle a constitué une sorte de révolution. Ses principes généraux sont connus : pour tenir compte de l’hétérogénéité des étudiants et de leurs projets, il faut développer la pluridisciplinarité et organiser l’enseignement en modules, avec des procédures de soutien et d’orientation. Dans un souci de cohérence, l’université a opté pour un schéma de DEUG unique pour tous les étudiants de lettres, langues ou sciences humaines avec trois caractéristiques : le choix d’une discipline majeure et d’une discipline mineure obligatoire, tout du moins pour la première année ; une période d’orientation où l’étudiant peut inverser sa majeure et sa mineure ; l’implantation d’un dispositif d’aide à la réussite en DEUG (DARD).

Mais la mise en place de la réforme ne s’est bien évidement pas limitée à cela. Dans notre UFR, nous avons décidé de jouer le jeu et pris un certain nombre de décisions que je voudrais rappeler.

D’abord, nous souhaitions remanier profondément notre offre de formation. Au-delà de modifications ponctuelles, nos maquettes avaient peu bougé depuis plus de dix ans. Or nous avions conscience que les attentes des étudiants n’étaient plus les mêmes. Je me souviens de nos premières réunions. La question centrale était : " que devons nous enseigner et pour qui? ". Tout le monde s’accordait sur un point, l’étudiant avait changé : variété des cursus, motivations complexes, confusion dans les représentations de la discipline ... Comme d’autres, nous sentions ce que François Dubet confirmera dans ses analyses transversales à partir des recherches du programme " l’université et la ville ", l’étudiant est d’abord un jeune et éventuellement un étudiant.. Pourquoi choisissait-il de faire socio? Quel était son projet? Etonnamment pour des praticiens de l’enquête, nous étions incapables de répondre très finement à cette question. Et pourtant, si un étudiant sur dix accède à un troisième cycle, fallait-il continuer à préparer exclusivement vers cette voie? Comment tenir compte des sorties en fin de première et deuxième année? Comment les préparer à entrer dans les IUFM ou les écoles spécialisées du secteur social? Enfin jusqu’où fallait-il intégrer dans leur cursus l’une de leurs attentes premières, comprendre la société et la place qu’ils y occupent? Ces questions, nous les connaissons tous. Traduites dans une réflexion pédagogique, elles peuvent se résumer de manière presque caricaturale à une seule: à quel niveau du cursus place-t-on l’étude des pères fondateurs et l’enseignement des spécialités?

Nous avons souhaité construire les modules d’enseignement en partant des attentes des étudiants et de ce que nous pensions être leurs besoins, et petit à petit les conduire vers nos spécialités. C’est ainsi qu’au niveau de la première et de la seconde année, la pratique de l’investigation sociologique a pris une place déterminante, mais nous l’avons couplée dans le même module à des cours de théorie sociologique et de connaissance des faits sociaux contemporains articulés autour d’une même problématique. A côté de ces modules fondamentaux ouverts aux étudiants inscrits en majeure ou mineure, nous avons construit des modules d’approfondissement pour nos étudiants. Enfin, les modules optionnels ont été réduits et proposaient des cours d’ouverture ou de perfectionnement. Dernières décisions, l’enseignement de l’histoire de la sociologie ne débutait que dans le module d’approfondissement de seconde année, pour se renforcer en licence et au-delà, l’enseignement des sociologies spécialisées était renvoyée en licence, et nous placions dans les modules fondamentaux de DEUG des enseignements liés à des apprentissages systématiques comme la constitution d’une fiche de lecture, la prise de note ou la recherche bibliographique.

Cette présentation est évidemment trop brève et imparfaite. Mais il est intéressant de raconter la suite. A Toulouse comme ailleurs, nous avons été envahis d’étudiants choisissant la sociologie comme discipline mineure, surtout les étudiants de psychologie et des autres disciplines de sciences humaines. Ainsi l’an dernier, le premier module fondamental a accueilli 1979 étudiants inscrits dont 1561 en contrôle continu. Même si en seconde année, la situation est plus apaisante avec 520 étudiants dans le module fondamental, nous nous sommes trouvés confrontés à un paradoxe et un dilemme. Le paradoxe est celui d’avoir construit un projet intéressant et d’être submergés par la masse au point de voir certaines de nos options difficiles à réaliser. Le dilemme est aujourd’hui posé, devons nous continuer?

Comme je l’ai indiqué, cette contribution est un point de vue personnel; mais ayant depuis quelques années la responsabilité de cette UFR, je mesure combien nous sommes placés dans une situation difficile. Je peux témoigner de l’énorme investissement de mes collègues sur la réforme du DEUG et également du second cycle puisque en quatre ans, nous aurons totalement modifié nos maquettes. L’enseignement en premier cycle est notre défi. Nous avons opté pour une organisation qui réponde au mieux à nos nouvelles missions et au nouveau public. J’ai le sentiment que nous avons eu raison sur l’essentiel des choix que nous avons faits, mais je pense que la situation pose problème.

Le premier problème est d’abord, le nombre d’étudiants. Certes, l’engouement pour la discipline peut nous permettre de nous développer, d’obtenir des postes et ainsi de renforcer la communauté des sociologues enseignants dans le supérieur; mais est ce raisonnable? Avec la réforme, nous sommes également devenus prestataires de services pour d’autres départements. Or, convaincus qu’il ne faut pas immédiatement spécialiser l’étudiant, nous offrons indistinctement aux étudiants inscrits en majeure ou mineure une formation lourde à la sociologie. Cela coûte en énergie, en investissement pédagogique, en gestion des études... Nous sommes également conduits à recruter beaucoup de chargés de cours. Enfin, on décèle une tendance à l’homogénéisation des contenus et des pratiques pédagogiques.

Par ailleurs, on peut se poser des questions sur les motivations et l’investissement des étudiants. Si déjà, l’étudiant choisit la sociologie comme discipline majeure pour des motifs parfois bien imprécis, c’est encore plus vrai pour la discipline mineure. La volonté de pluridisciplinarité et de réorientation inscrite dans la réforme est louable ; dans les faits l’étudiant est mal informé, enfermé dans des contraintes fortes et souvent peu motivé. Dans les amphis de première année, beaucoup d’étudiants attendent de recevoir un enseignement avec peu d’engagement et de conviction. Dans les T.D., ils sont plus motivés surtout pour les exercices d’enquête, mais semblent souvent étonnés de nos exigences ou de nos interrogations. Le tableau n’est pas si noir, et beaucoup d’étudiants également s’investissent, se passionnent, et par retour nous passionnent également. Mais l’apprentissage de notre discipline est difficile, et il nous faudrait alors plus de temps.

Bref, après trois ans d’expérience, j’ai le sentiment que nous restons passionnés mais que nous sommes devenus dubitatifs.

Alors, faut-il une autre réforme? J’aurai envie de répondre non, surtout pas! Et pourtant, la question doit être posée mais sans doute bien au-delà de la réforme du DEUG. Celle-ci révèle les défis auxquels l’université est aujourd’hui placée. Pour répondre aux missions qui nous sont confiées et aux attentes de la société civile, nous sommes amenés à faire le grand écart! Il nous faut donc faire des choix. Si la mission d’accueil des bacheliers, de leur socialisation et de leur formation est notre priorité, nous devons sans doute encore plus investir pour le DEUG et autrement. D’un autre côté, nous pouvons également considérer que le nouveau contexte ne nous permet pas de répondre aux besoins exprimés au risque de dénaturer et de perdre l’Université ; alors nous devons modifier le DEUG mais de manière structurelle cette fois, en créant le collège universitaire.

Le débat est ouvert.

 

 

Lettre de l’ASES :

au sommaire des précédents numéros

 

Lettre n°20 : juillet 1996

Alain Chenu : CNU 1996, un bilan

Philip Milburn : chronique d’une grève annoncée

Philippe Cibois : morale provisoire pour l’Université

Lettre n°19 : novembre-décembre 1995

Table ronde de l’ASES : sociologies pour non spécialistes (écoles d’ingénieurs, médecine, IUT, architecture)

Maryse Tripier : habilitations des DEA, la campagne 1995

Jean Pavageau : les qualifications de maitres de conférences en 1995

Lettre n°18 : été 1995

Bilan et perspectives, par les quatre présidents : Catherine Paradeise, Pierre Tripier, Bruno Péquignot, Maryse Tripier.

Jean-Pierre Terrail : les félicitations et leur inflation

 

 

 

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